« Transmettre pour ce que ça ne s’oublie pas » : le devoir de mémoire Au Musée d’Aquitaine

Romain Wenz, commissaire de l’exposition « Le monde d’après, 1944-1954. Des lendemains qui chantent ?», au Musée d’Aquitaine de Bordeaux, veut qu’elle « génère du dialogue entre les générations». ©Ana Puisset–Ruccella

À l’occasion des 80 ans de la Victoire du 8 mai 1945, le musée d’Aquitaine propose, pour sa réouverture, une nouvelle exposition immersive intitulée « Le monde d’après, 1944-1954. Des lendemains qui chantent ? » Avec les derniers témoins qui s’éteignent, les musées jouent un rôle clé dans la préservation et la transmission de la mémoire.

« C’est important de voir ce qu’il s’est passé et de faire savoir aux gens que cela peut se reproduire n’importe quand », confie Alain, 49 ans. Pour ce Québécois passionné d’histoire, il est essentiel de continuer à faire vivre le passé. Pour la commémoration du 8 mai 1945, le musée d’Aquitaine a décidé de marquer le coup avec une exposition centrée sur les dix années qui suivent la guerre. « Nous trouvions important d’évoquer cette période d’après la Libération car, aujourd’hui, elle a une vraie résonance contemporaine », affirme Laurent Védrine, directeur du musée.

Une exposition immersive

Au début du parcours, une photo attire le regard. Une scène de liesse. Des Bordelais fêtent la Libération : ils dansent, s’enlacent et brandissent fièrement le drapeau français. La fin de la guerre marque le début d’une nouvelle ère. Les visiteurs sont ainsi invités dans une boucle temporelle qui les plonge dans une décennie de grands bouleversements. L’exposition s’appuie sur une riche collection de documents d’archives, d’affiches, d’œuvres d’art, d’objets du quotidien et même de musiques d’époques – d’Édith Piaf à Georges Brassens en passant par Yves Montand – pour offrir une immersion totale.

« Nous souhaitions ancrer la mémoire dans les faits, des témoignages, dans quelque chose de concret », précise Romain Wenz, le commissaire de l’exposition. « L’idée, c’est que les gens puissent facilement se les approprier, notamment en famille. Que cela génère du dialogue entre les générations. » Un dispositif sensoriel, qui permet de mieux comprendre les réalités de l’époque et de ressentir, au-delà des faits, ce que pouvait être la vie pour celles et ceux qui l’ont vécue. « Ça me permet de comparer avec ce que m’ont raconté mes grands-parents, confie Julie, 30 ans. Et surtout, c’est important de pouvoir transmettre ce qui s’est passé pour que ça ne s’oublie pas. »

Un passé qui interroge le présent

Au-delà du souvenir, l’exposition propose aussi une réflexion sur les grandes questions d’hier et d’aujourd’hui. Sécurité sociale, féminisme, questions coloniales, construction européenne, armes atomiques… une partie des thématiques abordées résonnent avec certaines préoccupations actuelles. « L’objectif n’est pas d’opposer les générations mais de remettre les choses dans leur contexte », explique le commissaire de l’exposition.

La première partie du parcours est notamment consacrée à la propagande. « Il n’y avait pas moins de fake news en 1944 qu’en 2025 ! », lance M. Wenz. En abordant le rôle des images, des discours politiques, et de la manipulation de masse, l’exposition rappelle « qu’il faut toujours questionner la multiplicité des sources d’informations et leur croisement ». Plutôt que d’imposer une lecture unique, le musée privilégie l’ouverture : « On espère que les visiteurs trouveront des clés pour réfléchir, se faire leur propre opinion », conclut M. Weis. L’histoire semble plus que jamais essentielle pour comprendre le présent.

Ana PUISSET–RUCCELLA

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