Qu’est devenu le printemps des femmes arabes ?

« Comment les femmes peuvent-elles bouleverser des sociétés cadenassées par le sexisme et le patriarcat ? » La réalisatrice Feriel Ben Mahmoud tente de comprendre dans son documentaire la place des femmes dans le monde arabe. Avec un fil rouge : sans la démocratie, peu d’émancipation.

feminisme feriel

A Tunis, Beyrouth comme au Caire… Les femmes sont dans la rue. Elles manifestent pour réclamer plus de droits, plus d’égalité. Feriel Ben Mahmoud recueille leurs témoignages, filme leurs rassemblements et recherche les racines lointaines de ce sursaut récent. « J’ai eu l’idée de ce documentaire alors que je m’intéressais au rôle des femmes tunisiennes dans la révolution. Et toutes ces femmes qui manifestent pour une émancipation, ce n’est pas nouveau. C’est un mouvement qui a commencé au début du siècle, en même temps qu’en Europe… » raconte la réalisatrice invitée du Festival International du Film d’Histoire de Pessac. Son film y était projeté le samedi 2 avril 2016. 

Historienne de formation, elle nous plonge aux confins du XXème siècle. La première figure, essentielle, est celle de Tahar Haddad. Dans un ouvrage publié en 1930, le penseur tunisien est convaincu que la religion n’est pas un obstacle à l’ouverture des droits civiques aux femmes. Ses réflexions seront à l’origine du Code du Statut Personnel (CSP) en Tunisie, alors gouvernée par Habib Bourguiba.

 

Comment expliquer l’échec de ce projet égalitaire ? Feriel Ben Mahmoud formule un début de réponse. Pour elle, la faillite des idéologies issues du panarabisme va renforcer les pouvoirs conservateurs. En Egypte, la déroute du colonel Nasser lors de la guerre de 1967 met en péril la dynamique progressiste de son régime.

Et depuis 30 ans, l’influence des pays du Golfe comme l’Arabie Saoudite se fait ressentir. Dans son film, Feriel Ben Mahmoud diffuse des extraits de discours télévisés de prédicateurs religieux. Via les chaînes satellitaires, ces programmes sont regardés en Egypte, en Irak, en Tunisie… L’un d’entre eux dit clairement que « l’homme a le droit de battre sa femme, ‘seulement’ si elle se refuse à lui ».

 

Feriel Ben Mahmoud recueille de nombreux témoignages de figures militantes de tous pays. Des historiennes comme Sophie Bessis ou politologues comme Ghassan Salamé y livrent leur vision de l’avenir des femmes arabes. La réalisatrice estime que « le principal obstacle à cette émancipation des femmes » n’est pas la religion, car « les femmes du monde arabe, qu’elles soient musulmanes ou chrétiennes, réclament la même chose  ». Des systèmes multiconfessionnels comme au Liban ou plus démocratiques comme en Tunisie initient pour leur part des lois plus favorables aux droits des femmes.

Tous les spectateurs présents à Pessac ne sont pas de cet avis, à l’image de ce spectateur. Prenant la parole, il a exposé pourquoi selon lui c’est l’influence de la religion qui est une barrière à l’émancipation des femmes arabes.  « La Révolution des Femmes, un siècle de féminisme arabe » a été projeté dans de nombreux festivals en Europe, mais aussi à la télévision tunisienne.

Teaser – La Révolution des Femmes – Un siècle de Féminisme arabe – Un film de Feriel Ben Mahmoud from Drôle de trame on Vimeo.

Mickaël Chailloux et Aurore Richard

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