
Avec les ponts de mai et les beaux jours, les touristes sont de retour dans la métropole bordelaise. Parmi eux, un contingent important : les œnotouristes. En 2023, ielles étaient près de 2,5 millions venu·es à la visite des vignobles bordelais. Mais dans un contexte morose pour le monde viticole bordelais, l’œnotourisme ne semble pas la panacée.
3e destination viticole au monde selon le dernier sondage European Best Destinations. 2,5 millions de visiteur·ices en 2023. Le vignoble le plus visité en France d’après le rapport publié en février dernier par Atout France, l’agence de développement touristique française. Bordeaux collectionne depuis le début de l’année des signaux encourageants pour le tourisme viticole.
La tentation est donc grande d’y voir une chance face à la crise que traverse le monde viticole depuis de nombreux mois. Qui dirait œnotourisme, dirait augmentation de ventes de vin. C’est en tout le cas le sens de la dernière enquête menée auprès des viticulteur·ices bordelais·es par le département de la Gironde en 2019. Près de 84 % des visites de caves ou châteaux génèrent un acte d’achat. Près de 40 % des viticulteur·ices ayant répondu au sondage déclarent que les ventes aux touristes constituent au moins 20 % de leur chiffre d’affaires.
« Une goutte d’eau dans l’océan »
Mais pour Didier Cousiney, la situation n’est pas aussi simple. « L’œnotourisme n’épongera pas les vins dans les chais. » Le porte-parole du collectif vigneron Viti33 évoque seulement un marché de niche, un petit plus pour certains viticulteur·ices, mais jamais une sortie de crise. Pour lui, « l’œnotourisme ne reste qu’une goutte d’eau dans l’océan ».
Vigneron à la retraite, lui-même a un gîte touristique et il l’avoue : cumuler un travail à la vigne avec des activités d’accueil reste compliqué, voire impossible. Selon lui, l’œnotourisme profitera toujours aux plus grosses structures qui ont les moyens d’investir. Accueillir, héberger et accompagner demande une stratégie et un personnel dédiés.
Le département en soutien à l’œnotourisme
Pour aider les viticulteur·ices, l’office de tourisme départemental, lui, a multiplié les dispositifs. Conseil auprès des exploitant·es, aide à labellisation, développement de la marque Bordeaux Wine Trip. Même un magazine, Pulpe, a été créé pour valoriser l’œnotourisme bordelais.
Romain Bertrand, le directeur du Pôle Œnotourisme pour le département, le confirme : la demande d’activités oenotouristiques augmente. Les viticulteur·ices l’ont bien compris et « l’œnotourisme est donc réellement identifié par la filière viticole comme un axe de développement ». Mais pour lui, même son de cloche que Didier Cousiney : « L’œnotourisme n’est pas un remède miracle face à la crise viticole. » La croissance de l’offre est plus forte que celle de la demande. L’activité reste très concurrentielle, et de surcroît ne peut s’envisager que comme un investissement sur le long terme.
Force est donc de constater que l’œnotourisme représente davantage une opportunité pour la filière touristique bordelaise que pour le monde viticole lui-même.
Matthieu GAILLARD