Dans sa première pièce La nuit sans lune, Lucas Mabilat, vingt-deux ans, choisit de parler du déclic qui fait passer du déni climatique à la lutte. Un moyen de transmettre son engagement, via son art qui se veut de plus en plus engagé.
“La crise climatique, ça me touche beaucoup, et ça me met en colère. J’ai envie d’en parler tout le temps”. En parler, Lucas a choisi de le faire via son art préféré : le théâtre. En décembre 2023, le jeune homme de vingt-deux ans a reçu le premier prix de la catégorie “Écriture dramatique” du concours des jeunes écritures en Nouvelle-Aquitaine, Premiers Feux, organisé par le Service culture de l’Université Bordeaux Montaigne. L’étudiant en licence de théâtre membre du conservatoire de Bordeaux s’est également vu offrir une résidence d’écriture, pour continuer à avancer sur sa pièce.
Du déni à la lutte
Elle s’intitule La nuit sans lune : on y suit des personnages sur une île, où du jour au lendemain, le soleil a disparu. “Ils cherchent refuge, quand soudain leur lampe torche s’éteint”, raconte-il. “Ils entendent alors à la radio l’existence d’une mystérieuse femme qui pourrait les aider.” L’idée de ce texte lui est apparue lors des manifestations contre la réforme des retraites : “Je me suis demandé à quel moment il y avait ce déclic qui pousse les gens à aller manifester, ce déclic qui te fait basculer dans la lutte.”
Au début de la pièce, les personnages de Lucas ne sont pas du tout engagé⸱es. “Il y a une espèce de déni, explique-t-il, alors que le soleil a disparu… ce n’est pas rien quand même ! Et dans la réalité, c’est un peu ça qui se passe : les glaciers fondent, les tempêtes se multiplient et les forêts brûlent. Mais nous, on continue de faire comme si de rien n’était”.
A travers sa pièce, l’étudiant voulait également créer un texte qui rassure et suscite de l’espoir. “Ça m’intéressait d’écrire sur des personnages qui sont monsieur et madame tout le monde, et qui au final font basculer les choses.”
“La création, c’est un contre-pouvoir”
Ce que Lucas aime dans sa discipline, c’est qu’elle permet de raconter des histoires, qui à la fois résonnent de manière émotionnelle, tout en proposant une discussion avec le public. S’éloigner du réel en utilisant la fiction lui permet également de passer un message : “J’invente une histoire, oui, mais elle prend racine dans le monde réel. Je peux le déformer, et donc grossir les choses qui pour moi ne vont pas. Donc on les voit mieux et on peut mieux les comprendre.”
L’écologie, comme d’autres formes d’engagement, fait peu à peu leur place sur scène. On a pu le voir lors de la 35e nuit des Molières, où les discours féministes se sont suivis. “Il y a par exemple Quand viendra la vague d’Alice Zeniter, qui a un discours écologique”, propose Lucas. Il note tout de même un paradoxe : “L’industrie du théâtre est très polluante : c’est énergivore et on jette énormément, témoigne-t-il. Alors oui, L’écologie, ça passe par la création, mais aussi dans la manière qu’on a de créer.”
Retrouvez le reportage complet dans le journal d’Imprimatur spécial radio.
Agathe Di Lenardo