« Parmi les trop rares réussites de l’Europe, deux font – encore – à peu près l’unanimité: Airbus et Erasmus. » ironise le journaliste indépendant Jean-Claude Levandowski. Alors que les populismes métastasent partout en Europe, les jeunes s’unissent et font fi de cette conjoncture menaçante. Erasmus est véritablement le projet européen qui détonne. Que lui vaut une telle réussite ? Réponse en 4 points.
1. Le programme s’est élargi : Erasmus s’est fait son petit bonhomme de chemin. La preuve, en 1987, seuls 11 pays étaient inscrits. Aujourd’hui, ils sont 33 participants : l’Europe des 28 plus la Macédoine, l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Turquie. Ajoutons à cela de nouveaux candidats: l’Albanie, le Monténégro, l’Albanie et la Biélorussie. Et le Royaume-Uni compte bien y rester ! Aussi, le programme Erasmus est devenu « Erasmus + ». Avant, il existait d’obscurs dispositifs de mobilité (Comenius, Leonard de Vinci, Gruntvid…). Aujourd’hui, Erasmus + les regroupe tous. Il s’adresse à tous les jeunes de 13 à 30 ans et ne concerne pas que les étudiants. Claudio, Italien de 29 ans, s’est reconverti dans la pâtisserie et a pu suivre une formation professionnelle en Espagne. « Ma copine était elle-même étudiante en Erasmus à Salamanque, je l’ai suivie. Sans Erasmus +, je n’aurais pas pu bénéficier des mêmes avantages qu’elle« .
2. Les barrières sociales sont atténuées : Certains reprochent à Erasmus d’être réservé à une élite. Pourtant, en 2015, 35 % des étudiants partis en mobilité internationale avec Erasmus + étaient boursiers sur critères sociaux. Le manque de moyen ne doit plus être un problème. Une fois sur place, la langue est facteur de cohésion. « Communiquer dans une langue qui n’est pas notre langue d’origine ni celle de notre interlocuteur permet une forme d’harmonie. » explique Lisa, qui a fait son échange à Valence, en Espagne. « Impossible de savoir qui est fille d’ambassadeur ou fils d’ouvriers. Nous construisons l’identité que nous voulons, nous débarquons sans que personne ne sache quoi que ce soit de nous, un peu comme en colonie » plaisante-t-elle.
3. L’Erasmus est un cocon : L’association ESN (Erasmus Student Network) est commune à toutes les villes d’échanges. Elle accompagne les étudiants dans les démarches administratives et les aide à trouver un logement. « Je suis arrivé à Athènes complètement perdu, en auberge de jeunesse. Deux jours plus tard, me voilà en colocation dans un 100 mètres carrés » confie Antoine, étudiant en droit. S’ensuivent les voyages ESN, les tee-shirt ESN, les gourdes ESN… Bref, tout bon Erasmus est sponsorisé par son association et se délecte de la semaine annuelle à Ibiza, rassemblant chaque année près de 2000 étudiants. Cet accompagnement a un résultat « plutôt » positif : 100% des Erasmus recommandent Erasmus. Mais à chaque cocon ses limites.
4. L’expérience est intense : Après six mois ou un an à l’étranger, tous les étudiants subissent une forme de dépression post-Erasmus. « On parle de choc culturel inversé » constate Christophe Allanic, psychologue qui s’est intéressé à l’expatriation. « On est surpris que tout ce qui nous était familier devienne tant étranger » explique-t-il. Nikki, Irlandaise de 24 ans et quadrilingue, a trouvé une solution pour pallier sa tristesse : repartir très vite. « J’ai la bougeotte et ne m’imagine pas travailler en Irlande. Je suis devenue lectrice à Toulouse« . En France, les jeunes étrangers représentent 12% du nombre total d’étudiants. C’est cette génération qui participera au rayonnement culturel de l’Union Européenne.