Aujourd’hui s’ouvre à Bordeaux la neuvième édition des Abilympics, les championnats du monde des métiers des personnes handicapées. L’occasion pour Imprimatur de se pencher les possibilités d’accueil des enfants handicapés dans les crèches de la ville.
Une rampe descend en pente douce vers un jardin peuplé d’enfants. Bac à sable, trottinette et cubes aux couleurs vives ; toute la panoplie d’une crèche est disponible pour les bambins. Rien d’extraordinaire à première vue mais chaque jeu a été conçu pour un usage adapté. Nous sommes dans le jardin d’Hortense, où une bonne partie des enfants accueillis sont en situation de handicap.
Combler un vide
Choisir une crèche est souvent une prise de tête pour les parents. Trop de demandes pour peu de places. Trop cher, enfants mal encadrés. C’est le genre d’appréhensions qu’ils ont avant de confier leurs trésors. La crèche est pour beaucoup le premier lieu où l’enfant est confronté à l’autre, où il quitte le cercle familial pour trouve sa place dans un groupe. L’enjeu, de taille, est d’autant plus important pour les enfants en situation de handicap lourd, pour qui la vie n’a pas offert les mêmes chances à la naissance. « Les enfants handicapés ont longtemps étés mis à l’écart. Dans beaucoup de crèches privées, on ne leur accorde pas l’attention qu’ils méritent. Faute de moyens, de temps généralement. Proposer un suivi adapté coûte trop cher. Ce n’est pas rentable. », regrette un ancien employé du réseau Maison Bleue. Élever un enfant handicapé demande une attention de chaque instant, une disponibilité qui n’est pas aussi importante venant des employés des crèches. Un certain nombre d’établissements sur Bordeaux proposent dans tous les cas un accueil adapté pour eux. En théorie, les crèches publiques de Bordeaux ont toute la capacité pour les recevoir. Les normes de constructions sont pensées pour que ce soit le cas. Mais pour des besoins particuliers, il faut des accompagnateurs formés.
La différence est un apprentissage essentiel
C’est ce que proposent les établissements multi accueil. Ils sont une poignée, sur Bordeaux à mélanger les enfants handicapés et non handicapés. « Inclusif » est le maitre mot de ces établissements. « Beaucoup de parents arrêtent de travailler pour s’occuper de leurs enfants mais ce n’est pas la meilleure solution », confie virginie de Guio, de la crèche Canaillous-Brascassat. Sans parler de l’énergie que cela requiert pour la mère ou le père, l’enfant grandit à part. Un problème que l’on retrouve avec les assistantes maternelles. « Tout ce que nous faisons, et c’est essentiel de le comprendre, c’est de permettre à ces jeunes d’évoluer dans un environnement ordinaire » , développe Sylvia Dal Molin, assistante administrative du jardin d’Hortense. Dans cette crèche, certains moments gomment même ces différences. Beaucoup de jeux sont par exemple conçus pour permettre aux enfants de se mélanger et d’apprendre les uns des autres. « Par exemple, on développe beaucoup d’activités autour du toucher et du mouvement. Une de mes collègues est malentendante et propose aussi de communiquer en Langue des Signes Française . C’est ludique et ça plait à tout le monde ». Grandir dans un environnement où la différence est pas valorisée est tout aussi bénéfique pour les enfants non handicapés. « Les parents qui ont des enfants non handicapés les mettent aussi dans notre crèche car ils connaissent le projet de notre association et ils savent que c’est une démarche qui bénéficie à tout le monde. », ajoute-t-elle.
Trouver l’équilibre
« Il faut bien comprendre qu’on est pas là pour éduquer les enfants ou offrir un suivi médical. », prévient cependant Anne Brulis, directrice de la crèche Mille Couleurs. Les établissements travaillent avec les centres médicaux psycho-pédagogiques et d’action médico-sociale précoce pour permettre de coordonner le suivi. Les enfants en situation en handicap ne restent jamais à temps plein dans les crèches, compte tenu des nombreuses heures d’accompagnement par le personnel médical. La crèche doit ainsi jongler dans l’organisation avec tous ces rendez-vous, et s’adapter. Chaque enfant est à un stade différent de développement et s’y adapter implique une grande flexibilité de la part des accompagnateurs. Cela ne les dispense pas en revanche de respecter les règles de base de la vie collective : « On ne mange pas n’importe où, à n’importe quelle heure. La violence est proscrite. Il y a des choses qu’il est fondamental de comprendre, quelle que soit sa situation. »
Développer le multi accueil.
Depuis un an, l’Association Pour l’Innovation en Matière d’Intégration, gestionnaire du jardin d’Hortense, propose dans le cadre de son centre du CFAR, des formations autour de l’intégration d’enfants en situation de handicap en crèche. L’expérience accumulée par 9 ans de travail en la matière leur permet d’échanger sur les compétences attendues. L’objectif du projet est de promouvoir l’intégration des enfants en situation de handicap en milieu ordinaire de la petite enfance. Sur Bordeaux, les crèches multi accueil offrent beaucoup de place, mais dès que l’on s’éloigne de la ville, il devient presque impossible d’en trouver. Le jardin d’Hortense va s’agrandir, pour recevoir 30 places de plus d’ici 2017. « L’APIMI souhaite contribuer à la dynamique d’intégration des personnes en situation de handicap dès le plus jeune âge sur un territoire plus important », conclue-t-elle.