Pas de révolution, la lutte contre le SIDA passe par de petites évolutions

Depuis la découverte du VIH en 1983, quatre décennies de lutte se sont suivies sans se ressembler. Chacune a amené son lot de découvertes et d‘avancées qui ont fait de petits pas pour la médecine, mais un grand pas pour les malades.

La France est l’un des principaux acteurs internationaux dans la lutte contre le SIDA, et ce depuis qu’elle a identifié le rétrovirus en 1983. A travers des organismes comme l’Institut de recherche vaccinale (VRI) ou l’Agence Nationale de Recherche contre le SIDA (ANRS), elle a réussi en coopération avec les pays de l’OCDE à améliorer les conditions de vie des malades. En 1986, le premier traitement voit le jour, la monothérapie puis c’est au tour de la bithérapie et surtout de la trithérapie en 1995 de venir apporter l’espoir aux milliers de malades en bloquant le processus de réplication et d’infection du virus à l’aide d’une, deux puis trois molécules, chacune ayant un effet différent mais complémentaire. Les années 2000 voient la création de nouvelles molécules, spécialement conçues pour attaquer d’une nouvelle façon un virus qui mute pour résister aux coups de boutoirs de la science.

La perspective du quotidien

A la suite des premières grandes découvertes venues mettre un coup d’arrêt à l’expansion folle du VIH, l’heure est depuis les années 2010 à l’amélioration du quotidien des malades, soumis auparavant à des traitements très lourd. L’effort est alors placé davantage sur la simplification et la démocratisation afin de faciliter l’accès et la prise des traitements. La trithérapie (cocktail de trois molécules) permet de prendre simplement un comprimé par jour. L’essai ANRS-QUATUOR, qui a débuté en 2017, étudie une stratégie d’allègement thérapeutique chez plus de 600 personnes infectées par le VIH. L’étude révèle qu’une prise du traitement quatre jours sur sept est aussi efficace qu’une prise quotidienne. Afin d’espacer davantage encore le traitement, une administration par injection intramusculaire tous les deux mois (bientôt trois) est mise en place en 2021, sous certaines conditions de suivi et d’avancement dans la charge virale.

Avant le soin, la bataille de la prévention / sensibilisation

Dans le même temps, les associations comme le Sidaction ou AIDES s’organisent pour améliorer et avancer la prise en charge et le dépistage des malades. Plus la prise en charge se fait rapidement après l’infection, meilleures sont les chances face au virus. Les jeunes et la communauté homosexuelle sont les plus sensibilisés aux dangers du SIDA, ainsi qu’aux moyens de l’éviter. Ces derniers évoluent et se démocratisent également, avec par exemple l’élargissement de la prévention ou l’invention en 2012 de la PrEP (Prophylaxie pré-exposition), un traitement préventif très efficace pour les personnes non infectées par le VIH qui souhaitent avoir des rapports non-protégés en toute sécurité.

Un avenir à nuancer

Pour le Docteur Charles Cazanave, infectiologue au CHU de Bordeaux, malgré les victoires remportées contre le SIDA, beaucoup reste à faire. La priorité selon lui est de développer au maximum la stratégie dépistage/prévention, tout en continuant à optimiser et simplifier les traitements pour les malades. « Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que la lutte contre le SIDA est faite de petites évolutions, il n’y a pas de grandes révolutions ». De plus il note que si la France reste un des pays leader dans ce domaine, le COVID a ralenti les avancées en diminuant les moyens alloués à la recherche contre le VIH.

 D’ailleurs les nouveaux vaccins n’en sont pas vraiment, explique l’infectiologue. Ils consistent en réalité en l’injection d’anticorps monoclonaux, là où les vaccins “classiques” poussent le corps à produire lui-même ses anticorps. Les guérisons de trois malades différents ces dernières années, très couvertes par les médias, restent à nuancer. Des traitements très lourds à base de radiation et de chimiothérapie ont été utilisés, avec des risques de complications et d’effets secondaires énormes, ce qui empêche la possibilité d’utiliser ces techniques à grande échelle. Toutefois l’espoir est permis, car les derniers chiffres en France montrent une baisse en deux ans de 25% des  contaminations (6 500 en 2020, 5000 en 2022). Une avancée à apprécier à sa juste valeur.

Yohan CHABLE (@ChableYohan)

Victor-Louis BARROT (@VLouisBarrot)

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