Calendrier de rendez-vous saturé, stocks épuisés et inquiétudes des administrés : de nombreux élus locaux grondent contre la stratégie vaccinale mise en place par le gouvernement. Si Bordeaux n’échappe pas à ce désordre, les élus de la majorité n’ont jusqu’ici pas pris la parole à ce sujet.
Enfin ouverte aux plus de 75 ans, la campagne nationale de vaccination contre la Covid-19 promet d’être des plus périlleuses pour le gouvernement. Au début majoritairement hostiles au vaccin, les Français semblent aujourd’hui inquiets face à la lenteur de sa mise en circulation. Mardi, par l’intermédiaire de l’Association des Maires de France (AMF), ce sont les élus locaux qui ont tiré les premiers en demandant à l’Etat de « faire part d’une plus grande transparence sur la stratégie de vaccination afin de renforcer le climat de confiance et éviter l’incompréhension des citoyens. » De nombreux maires de grandes villes, comme Martine Aubry à Lille, dénoncent même « une pénurie de vaccins » (voir infographie).
Un vent de colère souffle à tous les échelons territoriaux. Même en Nouvelle-Aquitaine, alors que la région est, à la date du 19 janvier, celle qui bénéficie du meilleur taux de vaccination avec un peu plus de 1% de personnes vaccinées. “Les personnes qui souffrent d’insuffisances respiratoires sont aujourd’hui en détresse de ne pas pouvoir obtenir un rendez-vous pour se faire vacciner” tempête François Vincent, conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine et pneumologue au CHU de Limoges.
Une position floue
Pour les édiles, la mise en route timide énerve autant qu’elle était attendue. “La question de la logistique aurait dû être évoquée dès décembre mais l’ARS ne nous a pas fait signe, témoigne l’élu. Nous aurions eu une meilleure anticipation que l’Etat car nous sommes le maillon qui articule le mieux les territoires entre eux.”
Du côté des maires de l’agglomération bordelaise, les appels du pied s’enchaînent pour multiplier les centres de vaccination. “Pessac est candidate pour être « vaccinodrome » et atteindre enfin la vaccination massive sur le territoire” a plaidé son maire Franck Raynal, le 14 janvier au micro de France Bleu Gironde. Chaque commune veut son centre de vaccination, ou presque. Pour l’heure, 115 sont ouverts en Nouvelle-Aquitaine, dont 15 en Gironde et 4 à Bordeaux.
Si le maire de Bordeaux a bien déclaré que “la vaccination est le seul remède pour sortir de cette crise”, Pierre Hurmic n’a cependant pas commenté la stratégie vaccinale du gouvernement. Du côté de l’opposition, on déplore ce manque de communication de la part de la nouvelle équipe dirigeante : “il y a un manque évident de transparence de l’équipe municipale. Le problème avec cette majorité c’est que sur le Covid mais aussi sur tout le reste nous n’avons aucune information” fustige Marik Fetouh, conseiller municipal d’opposition (Bordeaux Ensemble).
“S’il y avait un consensus, EELV se serait exprimé sur le sujet”
Contactée par Imprimatur, Sylvie Justome, adjointe au maire chargée de la sécurité sanitaire, de la santé et des seniors a précisé la position claire de la majorité : “nous avons reçu un cahier des charges pour la vaccination de la part de l’agence nationale de santé et nous nous y tenons. Si le maire s’est refusé à tout commentaire sur la stratégie de l’Etat c’est parce qu’il ne sert à rien de protester systématiquement contre tout, et au contraire il faut donner l’exemple.”
Une mise au point qui tranche avec l’absence de prise de parole de la plupart des maires EELV à l’échelle nationale. “Avec ce silence, on peut imaginer qu’il n’y ait pas d’unanimité chez les Verts sur la question de la vaccination. Il y a un courant chez les Verts qui n’est pas favorable au vaccin” théorise Jean Petaux, politologue à Sciences Po Bordeaux. “S’il y avait un consensus, EELV se serait exprimé sur le sujet”. Il reste certain que le parti Europe Ecologie Les Verts ne pourra pas aborder les élections régionales, qui se dérouleront en juin 2021, sans une position plus claire sur la stratégie de vaccination.
Joseph Lacroix-Nahmias
Maxime Giraudeau