A des milliers de kilomètres de la guerre en Syrie, une association franco-syrienne girondine travaille dans l’ombre depuis de nombreuses années. Discrète mais efficace, Syrie Démocratie 33 a évolué en même temps que le conflit syrien.
Dans le ciel, un drapeau de la rébellion syrienne flotte. Femmes, hommes et enfants se donnent l’accolade et chantent en hommage aux Syriens morts et contre le régime de Bachar al-Assad. Sous un petit chapiteau, des photos de guerre côtoient des messages de paix. « Liberté », « Nous sommes tous frères sous le même soleil » peut-on lire.
L’association girondine Syrie Démocratie 33, place Pey-Berland, à Bordeaux, affiche son soutien à l’opposition syrienne à l’heure où la Syrie entre dans sa sixième année de guerre. Affectés et concernés par la cause, les franco-syriens de la région réagissent vite. Loin du terrain, ils éprouvent le besoin de soutenir le mouvement. Simplement se sentir utile. « C’est frustrant d’être loin, on a parfois le sentiment de ne pas pouvoir aider ceux qui sont là-bas », confesse Maya Safadi, présidente de Syrie Démocratie 33. « Beaucoup de gens ont encore de la famille en Syrie. On essaye de garder le lien, mais c’est délicat. On a envie d’aider ».
Et de l’envie à l’acte, il n’y a qu’un pas. Moins de quatre mois après le début du conflit, en juillet 2011, Syrie Démocratie 33 voit le jour. Les débuts sont rapides mais timides : quelques membres, une manifestation toutes les deux semaines. Les années passent et d’une poignée de personnes, l’association passe à plus d’une quarantaine de membres et une dizaine de bénévoles au sein de toute la Gironde. Franco-syriens mais pas que. Plusieurs Français embrassent la cause. Mais la guerre elle aussi évolue et prend de l’ampleur. D’une lutte pacifique, le mouvement se transforme rapidement en conflit armé. Les Franco-syriens d’Aquitaine observent impuissants à la destruction du pays. Plus de 270 000 morts et 2 millions de blessés. Le bilan est lourd. Des millions de Syriens fuient.
Au milieu du rassemblement Maya s’agite, supervise. Derrière sa frêle silhouette et ses yeux bleus, se cache une femme forte. Abandonner est impossible pour elle et l’asso. « Nous n’avons pas le droit de lâcher. Il y a des Syriens sur place qui sont dans des conditions horribles, nous qui sommes loin nous n’avons pas le droit de lâcher » , lance-t-elle. Active, disponible et motivée, Maya prend rapidement les rênes de l’association. Manifestations, rencontres, contacts avec les autres associations qui défendent la même cause se multiplient. « Ce n’est peut-être pas grand chose mais à notre échelle on fait ce que l’on peut », raconte Maya déterminée.
Coeur ouvert, main tendue
Syrie Démocratie franchit un cap en 2012. Quand les premiers réfugiés syriens arrivent, elle les accueille à bras ouverts. « On leur donne le sens de l’accueil », explique la jeune femme d’une voix calme. « Beaucoup sont parfois encore sous le choc. Ils veulent juste vivre, se reposer ». Après l’accueil, vient l’accompagnement. Les membres de l’asso s’organisent, redouble d’effort pour soutenir leurs nouveaux amis. Au programme, les suivre dans toutes les démarches administratives ou encore l’accès à l’apprentissage du français. Ils sont plusieurs Syriens à avoir reçu cette aide précieuse. C’est le cas de Mahmoud. Grand brun aux yeux verts clair et au regard doux et pétillant, le jeune homme est venu sur Bordeaux fin janvier 2016 pour apprendre le français. Syrie Démocratie 33 lui a permis de le faire à l’Université de Bordeaux. « Je suis actuellement réfugié politique, ça n’a pas été si simple », explique le syrien de 26 ans qui étudie le français depuis sept mois. « J’avais 21 ans quand le conflit a débuté, je suivais des études de dentiste. Mais j’ai du arrêter et jusqu’en 2013, j’ai été infirmier dans un hôpital civique. Puis je suis parti au Liban un an, et maintenant je suis en France depuis un peu plus d’un an », poursuit-il. Aujourd’hui, Mahmoud est hébergé en Gironde chez une Française, « par pur volonté d’aider ». Sur son avenir ? Mahmoud souhaite finir ses études ici et un jour retourner chez lui ». L’association, elle, veille sur lui en attendant. « Ils sont peut-être une centaine en Gironde comme Mahmoud. Cette jeune génération représente peut-être le futur de la Syrie. On peut les aider, faisons-le », conclut Maya.
Alors que la paix ne semble pas se profiler à l’horizon, Syrie Démocratie 33 continue le combat…loin des yeux, près du coeur.