‘Bonjour ! Je suis auteure… vous ne voudriez pas venir me poser quelques questions sur mon livre ? Le stand de mon éditrice n’est pas très loin d’ici, entre le vendeur de foie gras et l’espace fumeur ! Venez ; vous verrez, nous aussi on a des choses à dire…’. Karine de Velde insiste, et finit par convaincre, nous ferons une interview d’elle.
Tout ceux qui fréquentent de près ou de loin le monde de l’édition vous le diront : le salon du livre de Paris est l’endroit par excellence pour communiquer, présenter ses nouveautés mais aussi plus simplement pour se faire connaitre. Lorsque l’on s’appelle Gallimard, Flammarion ou encore Dargaud, la question de la promotion est moins vitale, tout le monde vous connait déjà. La seule chose à faire, c’est de communiquer sur les auteurs. Mais qu’en est-il des petits éditeurs ? Porte de Versailles, la notoriété est presque géographique. Les gros éditeurs occupent les meilleures places, au centre de la halle, tandis que les petits éditeurs sont relégués aux extrémités du salon.
Après avoir elle-même galéré plusieurs années en tant qu’auteure pour être publiée, il y a 4 ans, Cécile Langlois décide de monter sa propre maison d’édition. « J’ai décrété que j’allais me battre » lance-t-elle.
Au Salon du livre 2016, elle occupe un stand parmi la foule des petits éditeurs. Pas loin de la sortie, et surtout à l’écart des stands les plus importants. Un peu excentré donc. Les livres sont installés en tas les uns à côté des autres. Une séance de dédicace doit commencer dans quelques minutes ; que l’on soit publié chez Belin ou chez Cécile Langlois, l’exercice est le même pour tous les auteurs.
Money, money
On s’en doute, exposer au Salon du livre coûte cher. Pour madame Langlois, l’investissement est loin d’être négligeable. Au total cette année, les quatre jours d’exposition lui auront couté 3000 euros. D’autant plus qu’à la location, il faut aussi ajouter l’achat des accréditations et du matériel présent sur le stand.
« L’année dernière je partageais un stand avec un autre éditeur parce que je n’avais pas les moyens, mais cette fois, j’ai décidé d’exposer seule ».
Quand on l’interroge, Cécile Langlois est très claire à ce sujet, la présence de sa maison d’édition au Salon du livre se fait à perte. Mais là n’est pas la question. S’assurer une place parmi les 45 000 mètres carrés de l’espace Pégase, c’est pour elle le moyen de se faire des contacts. Rencontrer de potentiels nouveaux auteurs, d’autres éditeurs et bien évidemment des clients.
« Les gens qui viennent nous voir connaissent souvent déjà l’édition, mais d’autres passent aussi par hasard. A nous ensuite de les attirer et de leur présenter ce que l’on fait ».
Communiquer donc, et ne pas hésiter à racoler.
Un investissement qui se traduit physiquement, puisque Cécile et son équipe passent une bonne partie du salon à appâter le chaland. En même temps, l’occasion est trop belle puisqu’ils sont des milliers à arpenter chaque jour les dizaines d’allées qui parsèment la gigantesque halle. De la bande dessinée au roman en passant par les livres spécialisées, tous les genres sont représentés.
Cette stratégie de communication semble pourtant en énerver certains. Pierre, la soixantaine, est un habitué de la manifestation. Faire connaitre son travail et ses auteurs, il est pour, mais pas à n’importe quel prix:
« La dernière fois, on m’a presque bloqué le passage parce que l’on voulait absolument me présenter un auteur! Je ne pouvais pas passer. Je peux vous dire que cela ne m’a pas du tout donné envie de me rendre sur le stand de l’éditeur… Il faut savoir être dans la mesure ».
Cette année la fréquentation du salon a diminué de 15% par rapport à l’année dernière. Malgré cela, l’évènement littéraire reste pour un grand nombre de petits éditeurs une occasion unique pour communiquer. D’ailleurs Cécile Langlois sait déjà qu’elle sera de nouveau là l’an prochain.