Les représentants de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) et de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) se sont retrouvés ce matin pour le début des négociations conventionnelles avec l’Assurance maladie. Les pharmacien·nes veulent des compensations financières à hauteur de leurs nouvelles missions.
Les syndicats pharmaceutiques français se sont réunis dans le cadre des négociations conventionnelles avec l’Assurance maladie, ce mardi 19 décembre. Organisées tous les six ans, ces discussions reviennent sur les principaux points de friction dans le domaine médical. Inflation, revalorisation et précarité des officines sont remis sur la table. Retour en détail sur les revendications de cette journée.
Des enjeux économiques importants
L’Assurance maladie, les mutuelles, les étudiant·es et les représentants de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) et de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), ont entamé aujourd’hui à Montreuil (Seine-Saint-Denis), des négociations qui engagent notamment l’avenir économique de la profession pour les prochaines années. Les présidents de la FSPF et de l’USPO, Philippe Besset et Pierre-Olivier Variot, sont entrés en discussion avec la CNAM (chargée par le Ministère de la Santé de conduire les négociations) pour tenter d’obtenir des garanties économiques pour leur secteur.
Les négociations concernent divers aspects : les tarifs de remboursement des médicaments, les services fournis par les pharmacien·nes, les conditions de travail, ainsi que des questions liées aux prestations des établissements pharmaceutiques. Le rôle de l’Assurance maladie est de réguler le montant de la prise en charge, notamment la fixation des prix maximums que les compagnies d’assurance peuvent rembourser. Cependant, l’État a la mainmise sur le prix des médicaments et fixe les montants, ce qui permet d’uniformiser les prix dans toutes les pharmacies du pays.
Des salaires pas à la hauteur
Afin de limiter le budget de l’Assurance maladie, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau, a annoncé, dans une lettre de cadrage parue le 12 décembre dernier, souhaiter contenir la hausse des dépenses de médicaments. Il espère convaincre les pharmacien·nes de réduire le nombre de boîtes de médicaments dispensées à l’acte, voire de distribuer des médicaments à l’unité.
Or, le salaire des pharmacien·nes dépend largement de leurs honoraires de dispensation, calculés en fonction du nombre de boîtes de médicaments vendues, quel que soit leur prix. A titre d’exemple, les pharmacien·nes perçoivent actuellement 1,02€ pour chaque boîte de médicament remboursé vendue, ce qui représente 75% de leur chiffre d’affaires. La part de leur salaire issue des médicaments remboursables n’est pas calculée sur le prix, mais sur le nombre de boîte de médicaments délivrées. Ces honoraires de dispensation ont été créés par une réforme de 2015, qui avait pour objectif de ne plus faire dépendre le montant des salaires du prix des médicaments.
Pour que le projet du gouvernement de réduction des quantités de médicaments délivrés aboutisse, les syndicats des pharmaciens d’officine demandent en compensation une augmentation de leurs honoraires. Les syndicats estiment à un milliard d’euros le budget nécessaire pour mener à bien cette revalorisation. « Cela fait partie d’un équilibre. Cet équilibre est aujourd’hui posé sur la table avec l’Assurance maladie”, justifie Pierre-Olivier Variot, président de l’UPSO, à la sortie de la première séance de négociations. Il pointe également du doigt “la prise en charge des nouvelles missions”, à savoir l’administration de vaccins et la délivrance d’antibiotiques.
En réponse à cette revendication, le ministre de la Santé demande “d’ouvrir la discussion” sur de possibles “nouvelles formes de rémunération” complémentaires à l’acte.
Les effets positifs du Covid ont atteint leurs limites
Le Covid a représenté une augmentation de trois milliards d’euros de la rémunération des pharmacien·nes. Soit plus de 70 000 euros annuels supplémentaires par officine, en moyenne, au cours de cette période. Mais le contexte est aujourd’hui radicalement différent à cause de l’inflation. L’augmentation des charges et les pénuries de médicaments ont fait oublier la période du Covid. Un bras de fer s’est engagé entre les syndicats et l’Assurance maladie. D’un côté, la FSPS et l’USPO veulent assurer la pérennité des pharmacies, de plus en plus menacées par des difficultés financières. De l’autre, l’Assurance maladie doit faire avec des contraintes budgétaires plus drastiques.
Lors de la manifestation du 21 novembre, les syndicats avaient alerté le gouvernement sur la crise qui les touche. Vingt-cinq pharmacies fermeraient chaque mois depuis le début de l’année, a assuré Philippe Besset auprès de l’AFP. Un nombre record d’officines a mis la clé sous la porte en 2023, ce qui “fait chuter l’effectif sous la barre symbolique des 20 000 pharmacies dans notre pays, alors qu’elles étaient 22 000 en 2014”, détaille l’UNPF. De son côté, l’Assurance maladie entend veiller à ses préoccupations liées aux coûts.
Sahra Kadi-Pasquer et Jules Joué
avec Pierre Lassauge et Zian Palau pour la vidéo