C’est la douche froide… L’Office grec des statistiques, Elsat, a annoncé lundi un recul du PIB de 1,2% au quatrième trimestre de l’an dernier. Christos Zias est président de l’association Horizon Grecs dans la région de Toulouse. Citoyen français depuis 1995, il porte un regard très critique sur la crise que traverse son pays d’origine depuis 2008.
Manifestation pour le « non » au référendum de juillet 2015, sur la place Syntagma à Athènes. Photo TCC ©Ggia
Comment réagissez-vous aux derniers chiffres de la croissance, alors que la Grèce est en pleine négociation avec ses créanciers pour le versement d’une nouvelle tranche d’aide ?
L’Europe doit être solidaire. Je pense qu’il faut réellement ouvrir le débat de l’effacement de la dette publique grecque. Sinon c’est un mécanisme absurde qui permet aux établissements financiers de faire du profit sur le dos du peuple. « La banque vous prête un parapluie quand il fait soleil, quand il pleut, il vous le reprend. » C’est exactement comme ça que je résumerais la crise grecque. Les mesures qui sont appliquées à la Grèce ne peuvent pas produire de résultats, tout comme la passivité du peuple grec. Comme le dit une expression ancienne : συν Αθηνά και χείρα κίνει (sin athina kai cheira kinei) ; Il ne suffit pas d’invoquer l’aide d’Athéna, il faut agir soi-même…
Agir comment ?
Je pense qu’il faut un engagement citoyen pour peser dans les décisions. Le peuple doit intégrer les partis politiques et modifier les rapports de force. Sans la démocratie, il n’y a ni justice, ni répartition des richesses. Je ne suis pas fataliste, dans la vie rien ne se donne, tout se mérite par la lutte. Je suis optimiste… La nouvelle génération prend conscience de la difficulté de la situation, elle se battra pour trouver sa place.
Vous êtes établi en France depuis 1983 mais vous gardez des liens très forts avec votre pays d’origine. Vous êtes aujourd’hui président de l’association Horizons Grecs à Toulouse. A quoi correspond cet engagement ?
Au sein de l’association, nous organisons principalement des actions d’information. Nous essayons de donner une image réelle de ce qui se passe en Grèce, par l’intermédiaire de conférences et de films qui aboutissent à des débats. Nous nous efforçons d’analyser les dysfonctionnements de l’action politique en Grèce pour éviter la caricature. Pour proposer autre chose que le discours des médias…
Vous estimez que les médias caricaturent la crise grecque ?
Nous sommes dans une société de moins en moins démocratique car nous sommes dans une situation de monopole de l’information. C’est vrai en France, mais ça l’est aussi en Grèce et dans de nombreux autres pays.
Il y a beaucoup de liens entre la politique et les médias, et l’on constate que les journaux rejettent majoritairement la faute sur le peuple grec, alors que les banques sont les principales responsables. Le gouvernement a signé des accords qui ont fait perdre à la Grèce son indépendance…
Vous êtes en relation avec des associations grecques qui mènent les mêmes actions, localement ?
Chaque année, nous invitons une association grecque pour débattre de ce qui se passe sur place. La spécificité de l’association c’est qu’il s’agit d’un espace de débat où tous les avis, toutes les opinions ont leur place… Nous sommes parfois en désaccord, notamment sur le parti le plus à même de répondre aux exigences de la crise actuelle.
Il est toutefois plus difficile de débattre de ça avec les citoyens, en Grèce. Les Grecs ressentent de la culpabilité, de la honte à se trouver dans cette situation. Dans la campagne grecque, les mécanismes de solidarité et les cercles familiaux fonctionnent, mais dans les grandes villes, cela est plus difficile : les gens ont tendance à s’isoler dès lors qu’ils sont en difficulté…