L’inauguration de la ligne D du tramway à Bordeaux le 14 décembre s’inscrit dans un débat de longue date autour des extensions du réseau de tram. Celles-ci sont-elles vraiment bénéfiques pour l’agglomération ?
Bientôt quatre ans après le début des travaux, la ligne D du tramway a partiellement ouvert à la circulation. Le centre-ville de Bordeaux est relié à celui du Bouscat, avant une extension jusqu’à Eysines prévue pour le 29 février 2020. Sur la carte de l’agglomération, le tracé de la ligne dessine un axe vers le Nord-Ouest, zone autrefois désertée par le tram. Et le plan du réseau va se densifier ces prochaines années. Cette même ligne D devrait se prolonger jusqu’à Saint-Médard-en-Jalles à l’horizon 2024, quand l’antenne de la ligne A jusqu’à l’aéroport de Mérignac sera opérationnelle début 2022.
Une extension vitale ?
TBM ne compte pas s’arrêter là, puisqu’une concertation publique sur un projet d’extension de la ligne B vers Gradignan s’est achevé le 3 décembre. Une enquête publique devrait être lancée le mois prochain pour confirmer ou non le projet, ainsi que celui d’un transport en commun, de nature encore indéfinie, à haut niveau de service entre Gradignan et Talence. Le président de l’association Prendre le tram à Gradignan, Dominique Rolland, s’en réjouit. Il milite depuis 2010 pour que sa commune soit mieux reliée au centre-ville de Bordeaux. “La desserte des bus est insuffisante, avance-t-il. Nous avons la liane 10, qui passe par la gare St-Jean, mais qui ne permet pas aux gradignanais d’accéder directement au centre.” Idem pour la ligne 8 qui, au départ de Gradignan, ne trouve que l’hôpital Pellegrin pour terminus, à une vingtaine de minutes des quais bordelais par le tram A.
Dans plusieurs communes de l’agglomération, l’extension du tram est discutée. Pourtant, les avis divergent quant à la nécessité de ces projets. L’association Trans’CUB s’oppose depuis plusieurs années à la ligne D comme aux autres initiatives du même ordre. Jacques Dubos, responsable de l’association, regrette un projet coûteux (la ligne D a coûté 25 millions d’euros au kilomètre) alors que les priorités sont ailleurs : “Malgré tous les milliards investis dans les lignes en service depuis 20 ans, Bordeaux est toujours l’une des villes les plus embouteillées de France, derrière Paris et Marseille. Le tramway n’a donc eu aucun effet sur le report des modalités, c’est-à-dire le report de déplacement de l’automobile vers des modes doux.”
Un sujet qui n’inquiète pas Dominique Rolland, pour qui le tram reste avant tout un investissement à long terme : “sur 30 à 50 ans, le bilan est favorable au tramway qui est un système beaucoup plus robuste qu’un bus. Quand on le construit, c’est pour minimum 30 ans, avec des coûts d’exploitation moindres par rapport à un bus. Sur une longue période, on s’y retrouve parfaitement.”
En quête d’une troisième voie
Une alternative viable au tramway peut-elle exister ? Trans’CUB soutient depuis longtemps un système de « trambus », c’est-à-dire de bus circulant sur des voies consacrées, avec stations semblables à celles du tram, à billetterie intégrée. Du côté de Bordeaux-Métropole, la proposition a souvent fait débat. Une ligne de 20km censée relier la gare St-Jean à Saint-Aubin-de-Médoc est passée par deux délibérations d’utilité publique, qui ont été suspendues à chaque fois par la cour administrative d’appel, notamment à cause d’un manque de justification du tracé. Mais Jacques Dubos ne baisse pas les bras, plaidant pour de meilleurs investissements de la métropole en faveur des bus en site propre et des vélos électriques.
Théo Abarrategui & Timothée Croisan-Cecina