Le 5 février dernier, The Inspector Cluzo a sorti son cinquième album Rockfarmers. Quand ils ne sont pas sur scène, Laurent Lacrouts et Mathieu Jourdain sont paysans, dans les Landes. En tournée ou à la ferme, le duo ne triche jamais.
En résidence dans le Finistère, avant de lancer leur tournée, Laurent, la barbe hirsute et les cheveux en bataille et Mathieu, le béret gascon vissé sur la tête, ont quitté leur campagne landaise. Depuis 2013, c’est à Eyres-Moncube, que les deux complices ont décidé de s’établir pour se lancer un nouveau défi : tenir une ferme bio. Quand ils ne sont pas en tournée aux quatre coins du monde, The Inspector Cluzo élève des oies et des canards, dans leur ferme Lou Casse, dans le respect des traditions gasconnes.
La tradition avant tout
« On élève une centaine d’oies. Comme le faisaient nos aïeux, elles sont gavées trois fois par jours et seulement de mi-octobre à mi-février. Ce qui nous laisse le temps, le reste de l’année, pour nos répétitions et les tournées » explique Laurent. Cette période, proche de leur terre, est un véritable temps de régénération pour les deux rockeurs. « Quand on est à la ferme, on ne pense à rien d’autre. Nos préoccupations sont bien loin de la musique et des tournées ».
Mathieu et Laurent se chargent également de la préparation de leurs produits : confits, rillettes et foie gras, qu’ils exposent ensuite dans un local dédié à la vente directe et sur leur e-shop. Pour les deux acolytes, il était important que leurs aventures paysannes débutent sur leurs terres natales, « Notre pays, la Gascogne, est très ouvert d’esprit. Nous avons une clientèle de gourmets, qui sait apprécier les bonnes choses, où il y a une culture du produit et du consommer local » explique Laurent. La recherche de la qualité est donc primordiale pour ces gourmands, dans une société où aujourd’hui selon eux « ça ne gêne plus personne de faire un super plat, avec un poulet de merde ! ».
Le goût du vrai
C’est pendant leurs concerts que les deux compères ont décidé il y a trois ans de « faire bien à manger », comme ils disent. Car avant d’être fermiers, les amis sont avant tout des rockeurs, à l’agenda bien rempli. Depuis huit ans que le groupe existe, Laurent et Mathieu ont fait plus de 800 dates à travers le monde.
Leurs tournées, des États-Unis, à la Chine, en Afrique du Sud, en passant par le Japon, où ils sont de véritables stars, leur ont fait prendre conscience de l’industrialisation massive de l’agriculture par les géants de l’agroalimentaire. « Les populations sont totalement déracinées. Elles ne savent plus se faire à manger, car elles sont prisonnières de multinationales » se désole Mathieu. C’est notamment lors d’une tournée en Colombie, sur la tierra madre d’Amérique du Sud, que les deux paysans ont pris conscience de l’importance du retour à la terre et de la nécessité de faire changer les choses, « pour construire la société, le citoyen doit se bouger et ne pas attendre le politique » martèle Laurent.
Si leur vie d’artistes a des conséquences sur leur activité agricole, le schéma se fait également dans le sens inverse. A l’image du rock blues, qui puise ses origines aux États-Unis, c’est un retour aux sources du rock, « au vrai rock », que propose The Inspector Cluzo. « On se sert de la terre, de la nature et cela rejaillit clairement dans notre musique ». Et pour rester authentique jusqu’au bout, le groupe propose son nouvel album, Rockfarmers, sur vinyle, « pour suivre le tempo et vivre la musique comme un match de rugby ».
C’est à la fin de leurs concerts que Laurent et Mathieu allient musique et bonne bouffe. Les deux rockeurs proposent alors à leurs fans d’acheter leur vinyle, accompagné des paroles illustrées dans un livre et d’un reportage sur leur vie de rockfarmers, le tout accompagné de rillettes et de confits. Et avec une nouvelle tournée et de nouvelles dates prévues à l’étranger, The Inspector Cluzo reviendra du Japon dans leur ferme Lou Casse avec, pourquoi pas, l’idée de cultiver du riz.