Après trois jours de débats tendus, le procès pour trafic d’armes au tribunal correctionnel de Bordeaux entrait aujourd’hui dans sa phase décisive. Le procureur adjoint David Arnault a requis des peines allant jusqu’à 10 ans d’emprisonnement contre les principaux prévenus, accusés d’avoir alimenté un trafic d’armes ayant servi dans des règlements de compte. Les avocats de la défense dénoncent des irrégularités procédurales et une enquête biaisée. Le verdict est attendu dans la soirée.
« On parle bien d’un trafic, pas d’une vente isolée » a martelé le procureur David Arnault aujourd’hui dans son réquisitoire mettant fin à trois jours de procès houleux au tribunal correctionnel de Bordeaux. Dans le box, les sept prévenus comparaissent pour trafic d’armes et association de malfaiteurs. S’appuyant sur une « pléthore de messages actés en procédure » pour démontrer l’ampleur du réseau, le procureur a requis : 10 ans de prison pour le responsable présumé du trafic, 7 et 5 ans contre un père et son fils accusés d’avoir fourni des armes issues de cambriolages ciblés, et 10 ans pour un détenu toulousain soupçonné d’avoir armé ses proches. Contre la compagne du principal prévenu, impliquée dans l’achat de 11 fusils à pompe, 12 mois de prison avec sursis ont été requis.
Des débats houleux dès l’ouverture
Les trois jours dans le tribunal ont été marqués par des invectives entre le procureur, la présidente d’un côté et les avocats de la défense de l’autre. Dès lundi, ces derniers ont attaqué la validité de la procédure. Maître Raphaël Chiche, représentant l’un des principaux prévenus, a dénoncé un jugement antérieur annulé pour vice de forme. « Quel texte ? Quelle source de droit ? Vous n’avez rien ! » a-t-il lancé face à la présidente Catherine Bonnici. Le procureur Arnault a rejeté ces affirmations, considérant que le tribunal était « largement compétent ».
Une fois les questions procédurales écartées, les débats se sont recentrés sur les faits reprochés : possession et revente d’armes de guerre, transactions suspectes et implications dans des règlements de compte. Dans le box, certains prévenus ont nié les accusations. « Je n’ai rien à voir avec ce trafic » a clamé l’un, tandis qu’un autre qualifiait l’enquête de « totalement bâclée ».
Des accusations de partialité enveniment la deuxième journée
Hier, la tension est montée d’un cran lorsque Maître Thomas Bidnic, avocat récemment arrivé dans le dossier, a demandé la récusation d’un juge pour partialité. « Ce tribunal manque d’impartialité, c’est insupportable » a-t-il dénoncé, qualifiant la situation de « mascarade ».
Ces accusations ont entraîné une série de suspensions. La présidente Catherine Bonici, excédée, a tenté de rétablir l’ordre : « J’en ai marre d’entendre des hurlements en permanence ».
Dans la salle, l’atmosphère était électrique. Les avocats de la défense ont dénoncé un dossier biaisé, tandis que les prévenus maintenaient leur position. « Je n’ai jamais touché à une arme » a insisté l’un d’eux. Chaque suspension d’audience accentuait la tension, visible sur les visages de leurs proches.
Des réquisitions lourdes et un climat pesant
Aujourd’hui, après deux journées chaotiques, la séance s’est déroulée dans un calme relatif, mais l’atmosphère restait lourde. « Nous assistons depuis deux jours à un procès surréaliste » a lancé David Arnault en préambule de ses réquisitions.
Le procureur a décrit un réseau structuré, impliquant des cambriolages ciblés pour récupérer des armes revendues « au plus offrant ». « Ces armes ont servi dans des règlements de compte, notamment à Toulouse » a-t-il souligné, avant de détailler les rôles de chaque prévenu. Malgré ces réquisitions sévères, la défense a continué de dénoncer un dossier « insuffisamment étayé ». « Les mots comptent, mais les actes encore plus. Où sont les preuves ? Où sont les armes ? » a martelé Maître Christian Blazy.
Dans le public, les proches des prévenus échangeaient des regards inquiets, retenant leur souffle à l’évocation des peines. Le verdict est attendu dans la soirée.
Pierre Cazemajor