Dans la Métropole bordelaise, environ 2500 personnes vivent dans des squats ou bidonvilles. Accès insuffisant à l’eau, promiscuité, il y est difficile de se protéger du coronavirus dans ces conditions. D’autant plus que la nourriture commence à manquer…
Le chemin va être difficile. Lundi matin, malgré le confinement obligatoire, 200 personnes ont décidé de rentrer en Roumanie. La crise sanitaire et alimentaire dans les squats et campements girondins devenait trop importante.
Sur les 2500 occupants de ces habitats précaires comptabilisés par le tissu associatif bordelais, aucun cas de Covid 19 n’a pour l’instant été déploré. Mais si l’un des occupants l’attrapait, la situation devenir rapidement ingérable. Les habitants vivent les uns sur les autres. « Il n’est pas rare de trouver 6 ou 12 personnes dans la même chambre. », détaille Morgan Garcia, coordinateur de la mission squat pour Médecin du Monde. Difficile dans ces conditions de respecter le mètre de distanciation sociale prôné par les médecins.
A la recherche de l’or bleu
Si Morgan passe dans les squats avec un traducteur pour détailler les « gestes barrières » (lavage de main, éternuer dans son coude), les occupants peinent à les respecter. « Au moins 600 personnes n’ont pas accès à l’eau. Elles sont obligées de sortir en chercher dans les cimetières , les stades, les bornes incendies… », explique le coordinateur de Médecin du Monde. Elles s’exposent au virus mais aussi à l’expulsion. « Certaines sont en situation d’irrégularité. D’autres stressent parce que leurs papiers doivent être renouvelés mais la préfecture est fermée. Ils jouent leur vie… » rappelle Bernie, une bénévole du collectif Bienvenue.
Même pour ceux qui disposent d’un accès à l’eau, le dispositif est rarement satisfaisant. Certains points sont dépourvus d’évacuation. L’eau, qui peut être contaminée, stagne. D’autres sont utilisés par 40, voire parfois 200 personnes. « Si le robinet n’est pas désinfecté, il peut devenir le foyer d’une épidémie », déplore Bernie. « Même chose pour les points d’eau mis en place par la mairie, d’ailleurs fermés jusqu’à la semaine dernière, pour « gel » », ajoute-t-elle. La Préfecture et la Métropole de Bordeaux, en charge de ce dossier, n’ont pas souhaité s’exprimer, jugeant nos délais de publication trop courts.
La menace de la sous-nutrition
Surtout, les humanitaires craignent des cas de sous-nutrition. Sans passants dans les rues, faire la manche est inutile. La récupération de denrées alimentaires aussi se complique : les restaurants sont fermés et les invendus se font plus rares. De ce fait, la demande a explosé. « 61 repas en vingt minutes. Une maraude ne peut pas assurer une cadence pareille ! », a résumé Estelle, des Maraudes du cœur à Bernie.
Le tissu associatif bordelais, dont Bienvenue, déplore le manque d’engagement des pouvoirs publics. Ensembles, ils leur ont envoyé une lettre ce mercredi 25 mars. Les organisations y vendiquent, pour les habitants des squats et des bidonvilles, un meilleur accès aux soins, à l’eau, et des livraisons de produits alimentaires et hygiéniques.
Cette semaine, ils ont déjà réussi à obtenir un coup de pouce des collectivités locales. « On a réuni l’équivalent de dix jours de nourriture maximum, mais le confinement va sûrement durer plus longtemps… », alerte Bernie.