Euthanasie active, suicide assisté, droit à mourir dans la dignité… La question est peu (ou mal) évoquée par les candidats à l’élection présidentielle…
Dans la course à la présidentielle, rares sont les candidats qui se positionnent clairement sur la question de l’euthanasie. Un sujet épineux, et pourtant… 90%* de la population se déclare en faveur de la légalisation d’une aide active à mourir.
En 2012, l’association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) avait organisé un meeting pour interpeller les candidats sur l’évolution de la législation en matière de fin de vie. L’expérience sera renouvelée le 18 mars prochain. Les prétendants à l’Elysée seront invités à partager leurs solutions sur un sujet qu’aucun d’eux, à l’exception de Jean-Luc Mélenchon et quelques candidats réfractaires, n’évoque clairement.
Bien souvent, le terme de ‘droit à mourir dans la dignité’ est utilisé à tort et à travers parce qu’il n’implique aucun engagement. Un manque de parti pris que déplore Christophe Michel, secrétaire général de l’ADMD : « le mot dignité ne veut rien dire ; chacun juge sa propre dignité. Le plus important est de savoir ce que l’on met derrière ces mots là…
Véritable engagement ou faux-débat ? Etat des lieux de la position des candidats à l’élection présidentielle sur la question de l’aide active à mourir
« En France, nous avons un problème d’engagement politique. »
Que veut dire Benoît Hamon lorsqu’il évoque une « aide médicale pour mourir dans la dignité », et en quoi est-ce si différent de ce que garantit la loi Claeys-Leonetti ? Le candidat du Parti socialiste s’est déjà positionné en faveur de ce droit, mais son programme politique n’évoque en rien les conditions de mise en œuvre d’une législation sur l’euthanasie et le suicide assisté. Mettons cela sur le compte de la tendance à rédiger des programmes courts, plus accrocheurs. Benoît Hamon aura l’occasion de développer sur ce point dans quelques jours.
L’existence même du meeting de l’ADMD montre que les représentants politiques, quel que soit leur camp politique, peinent à tenir une ligne claire et sans langue de bois, de manière spontanée, et pourquoi pas militante à ce sujet. Le silence d’Emmanuel Macron laisse planer le doute sur la nature de son engagement politique au sujet de la fin de vie, et le débat s’annonce d’ores et déjà compliqué pour le candidat d’En Marche… Sa principale force pourrait bien devenir un obstacle de taille : les soutiens d’Emmanuel Macron viennent de bords politiques aussi variés qu’il y a d’avis sur la question. François de Rugy souhaite soumettre la question au référendum, tandis que François Bayrou s’oppose fermement à toute aide active à mourir. Jean-Louis Touraine, député de Rhône et conseiller santé d’Emmanuel Macron, porte quant à lui cette question depuis des années, et avait déjà proposé un amendement pour une aide active à mourir lors de la loi Leonetti. C’est lui qui représentera Emmanuel Macron lors du meeting du 18 mars. Reste à savoir qui renversera la balance…
L’écart se creuse entre les Français et leurs représentants…
Neuf français sur dix* se déclarent favorables à la légalisation de l’euthanasie. Un chiffre exorbitant au regard du nombre de représentants politiques, principalement de droite ou d’extrême-droite qui s’y opposent. Le sondage révèle par exemple que 92% des Français proches des idées des Républicains seraient favorables à la légalisation de l’euthanasie active ; ils seraient 84% parmi les sympathisants FN.
Les raisons de ce décalage sont multiples et bien souvent, les convictions personnelles et la pression de certaines groupes (notamment religieux) prennent le pas sur la volonté des citoyens à faire évoluer la législation sur des questions sociétales à vocation universelle.
Un « combat d’élites médicales, religieuses et politiques qui refusent que le patient puisse avoir son dernier mot à dire » selon Christophe Michel. Le débat mérite pourtant d’être alimenté, les médecins étant eux-mêmes majoritairement en faveur de l’euthanasie active**.
En France, selon les rapports officiels de l’Ined, 3.000 euthanasies clandestines seraient pratiquées chaque année. Les partisans d’une aide active à mourir militent pour que la question trouve sa place cœur du débat politique, afin d’encadrer au mieux les pratiques et éviter au maximum les risques de dérives.
*Sondage Ifop (2015)
**Sondage IPSOS pour le Conseil National des Médecins (2013)