Ce mardi 2 décembre 2025, l’appel à la grève de l’intersyndicale comprenant Solidaires, la CGT et FSU n’a réuni que 350 manifestants à Bordeaux pour s’opposer au projet de budget 2026, étudié cette semaine à l’Assemblée nationale. De quoi questionner, jusque dans le cortège, sur la pertinence de ces journées de grève.
Une ribambelle de courageux bravaient la pluie pour battre le pavé détrempé contre le projet de loi de Finances 2026. Les drapeaux des trois syndicats qui ont appelé à la grève ( la FSU, de la CGT et de Solidaires) flottent en l’air. Une mobilisation peu suivie qui n’a pas causé de perturbations des transports ou des écoles. Leurs revendications portent sur le budget voulu par le gouvernement Lecornu. À l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances de la Sécurité sociale est revenu ce mardi 2 décembre en deuxième lecture. Cependant, peu de chance de déboucher sur un accord tant la situation politique est instable.
Dans le texte, des coupes drastiques dans le secteur de la santé. Michaël Casimir, du syndicat Sud Santé Sociaux de Gironde, regrette la « politique d’austérité qui se met en place et qui est de plus en plus en dur pour les hôpitaux et pour les hospitaliers. » Dans les CHU girondins, Michaël Casimir constate que « les conditions de travail se dégradent. »
Larissa, syndicaliste FSU et professeure en philosophie à l’INSPE, justifie sa sortie dans la rue par son combat contre « l’année blanche souhaitée par le gouvernement qui s’accompagne de la paupérisation de tous les métiers ». Elle la constate dans son métier avec « une précarisation de plus en plus importante et le recours aux vacataires mal payés et mal formés. » Selon le collectif Nos services publics, le nombre de vacataires à l’université a bondi de 30 % depuis 2017 et l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron. Le projet de loi de finance du gouvernement vise aussi à supprimer 4.000 postes d’enseignants dans le premier degré, ce à quoi elle et son syndicat s’opposent. Le gouvernement justifie ce choix par la forte baisse des effectifs d’élèves.

Une manif qui ne fait pas le plein
Les slogans accusateurs envers le gouvernement scandés par quelques dizaines de manifestants n’auront pas suffi à couvrir la réalité : le mouvement s’essouffle. Lors de la première manifestation de l’intersyndicale le 18 septembre dernier, 9000 participants avaient été recensés à Bordeaux ; 2600 le 2 octobre dernier. Avec 350 manifestants et un nombre de grévistes indéterminé, la date d’hier s’inscrit dans cette dynamique de baisse d’affluence. Pour Aurélie, enseignante syndiquée à la FSU,il ne faut pas regarder le nombre, mais plutôt la motivation. « Même si on est pas hyper nombreux dans la rue, on sait que nos revendications sont partagées par une majorité de la population », affirme-t-elle.
Pour Larissa, professeure de philosophie syndiquée à la FSU, c’est aussi l’absence de prise en compte des mouvements sociaux par l’exécutif qui n’inciterait pas à la mobilisation. « Le dialogue social est devenu une mascarade. Il y a une pratique verticale de toutes les décisions à tous les niveaux de l’administration », dénonce-t-elle. Elle ajoute que le risque de violence policière « freine aussi les gens dans leur volonté de manifester », estime-t-elle.
Les tactiques des syndicats sont aussi parfois remises en question par leurs militants eux-mêmes. C’est le cas de Michaël Casimir, sceptique sur l’impact de ces manifestations organisées une journée par mois sans s’inscrire dans la durée. « La date d’aujourd’hui est sans lendemain, sans perspective, c’est pour cela qu’elle fait flop. »
À l’échelle girondine de la FSU, la question des modes d’action se pose de plus en plus et les avis sur la question ne sont pas les mêmes qu’à l’échelle nationale. « Rien ne remplacera un blocage de l’économie », estime Michaël Casimir. Si on n’est pas en capacité de mettre en place un rapport de force pour taper dans le porte-monnaie du patronat, on n’arrivera pas à faire pression sur le gouvernement. »
Conscients qu’ils peinent à mobiliser en dehors de leur cercle, les militants s’accrochent cependant à leurs convictions. D’après Aurélie, « rester silencieuse à subir, c’est peut-être cela qui est le plus démoralisant. »
Luca MENTZER et Noé RACOFIER

