À 14 ans, elle implique Eysines dans la « grainothèque mondiale »

Lily, 14 ans, pose à côté de sa grainothèque. © Yann Guenon

Le vendredi 13 décembre, les Eysinais·es ont assisté à l’installation d’un meuble particulier : la grainothèque, une bibliothèque à… graines. Proposé par une Eysinaise de 14 ans, ce projet a vu le jour grâce au budget participatif de la ville.

Sous les puissants néons de la médiathèque, entourée d’une partie des élu·es à la mairie d’Eysines, d’employé·es de la médiathèque ainsi que d’expert·es du monde des graines, Lily 14 ans s’avance pour présenter son projet : sa grainothèque. Une trentaine de personnes sont venues assister à cette inauguration, à l’étage de la médiathèque Jean Degoul à Eysines. Légèrement stressée, elle refuse le micro et préfère parler de vive voix, avant de détailler le fonctionnement de ce meuble qu’elle a imaginé. 

Cette grainothèque a vu le jour grâce au programme de budget participatif d’Eysines, une somme de 100 000 euros réservée à la réalisation de projets venant des Eysinais·es, soumis à leur vote. Juliette Perez, directrice adjointe au Cabinet du Maire et chargée du budget participatif souligne : « Sur les 27 projets déposés, la grainothèque est arrivée 6ème ! ». En plus de ce bon classement, Lily est la seule mineure à avoir déposé un projet pour cette édition. Chose d’autant plus rare que pour l’édition précédente, aucun·e mineur·e n’avait déposé de projet. Annoncée en grande pompe par la mairie, ce projet s’inscrit dans une dynamique plus globale de la ville, comme l’explique Juliette Perez : « On a le projet d’ouvrir une maison des semences à Eysines. »

Une grainothèque 100% eysinaise

Conçu comme un point d’échange de graines, le meuble est composé de trois étages. Ceux du haut et du bas sont destinés à la documentation, avec une dizaine de livres offerts par la médiathèque axés sur la biodiversité, l’agriculture et bien sûr les graines. Celui du milieu divisé en trois plateaux est destiné au cœur du projet, le stockage des semences. Il y en a de trois types : les potagères, les aromatiques et les ornementales ainsi que tout ce qu’il faut pour les « ensacher » afin de les récupérer et de les échanger.

Mais le meuble est plus complexe qu’il n’y paraît. Conçu par la menuisière de la région Christel Truteau, son plateau du milieu est rétractable, et il est composé de bois recyclé provenant entre autres des forêts incendiées, il y a deux ans, dans le bassin d’Arcachon. Lily détaille sa fabrication : « Avec mon père, nous avons visité d’autres grainothèques, et je n’avais pas pensé directement au meuble, mais plutôt au système. Le meuble, il est venu vraiment après ». Il est prévu  qu’il soit installé dans la médiathèque pour le moment.

Un moment d’échange autour des graines

L’idée derrière ce projet est l’échange de plantes, fleurs ou arbres entre les habitant·es : « Au début, j’avais pensé à des bulbes, sauf que c’était trop grand pour aller dans un sachet, et puis ça pouvait se détériorer un petit peu au fil du temps. C’est pour ça que c’était plus pratique d’échanger des graines dans des sachets que des bulbes ou des plants » , explique-t-elle. Chaque sachet contient une trentaine de graines.

Cette inauguration a aussi été l’occasion de donner la parole à des expert·es du domaine. Bruno Wisniewski, formateur en botanique et écologie basé à Libourne s’est lancé le défi de raconter les 12 000 ans de l’histoire de la graine en 13 minutes. Il l’a finalement fait en cinq. Le spécialiste rappelle que 90% de ce que l’on mange provient d’échanges entre l’Europe et le reste du monde. « Ce meuble est une petite partie de la grainothèque mondiale », lance-t-il. Caroline Miquel, artisane semencière aux Jardins Inspirés, un jardin associatif à Eysines, a quant à elle rappelé l’impact des graines de type F1, graines majoritairement présentes dans le commerce qui ne peuvent se reproduire, obligeant à en racheter chaque année. Elle se réjouit de ce genre d’initiative car pour elle, remettre la grainothèque au service du partage et du bien commun est un « acte politique ou du moins militant ».  Et comme une graine ne se conserve pas mais se reproduit à l’infini, Caroline Miquel rappelle que « la seule façon de conserver des graines, c’est de les faire pousser ».

Yann GUENON

Retour en haut
Retour haut de page