À Bordeaux, l’aide apportée aux Mahorais·es se structure

Rachid, président du collectif de La Piraterie, collecte des denrées devant le Carrefour City pour Mayotte. © Elise Raimbaux

Après la sidération du cyclone Chido qui a frappé Mayotte samedi 14 décembre, le temps est désormais à la mobilisation solidaire dans la métropole bordelaise. Fragmenté mais riche d’un élan commun, le soutien apporté à la population mahoraise ne cesse de croître.

Le sourire scotché sur le visage malgré le froid, Rachid s’affaire à peaufiner l’agencement de ses affiches de fortune, sur lesquelles il est écrit en lettres capitales : « Dons pour Mayotte : condiments, nourriture sèche, shampoings… ». En réponse à l’urgence de la situation, une collecte pour Mayotte s’est organisée mardi 17 décembre dans le quartier de Tauzin à Bordeaux. Posté devant un Carrefour City, le chariot réquisitionné pour la collecte commence à se remplir de victuailles.

Directeur de l’association La Piraterie implantée depuis 7 ans dans le quartier, Rachid interpelle les passant·es, dont la plupart ne sont pas encore au courant de la tragédie en cours à Mayotte depuis 4 jours.  « J’ai vu les images à la télé. C’est horrible. J’ai l’avantage d’avoir une association, c’est justement dans ce genre de moments qu’il faut faire appel à la solidarité », commente-t-il. L’air déterminé, il aime à rappeler une évidence qui lui tient à cœur : « Les gens ont tendance à trop souvent l’oublier, mais Mayotte est un département français. » Le visage à moitié couvert par une épaisse écharpe en laine, Mag rassemble les packs d’eau accumulés au pied du chariot. C’est elle qui est à l’origine de cette initiative de collecte : « J’ai de la famille là-bas, je me sens doublement concernée. Ça fait des années que la situation est dramatique sur l’île. C’est la moindre des choses de se montrer solidaire. » À 19h, le premier chariot est déjà prêt à rejoindre le stock accumulé depuis trois jours au QG de l’association. Dimanche, les vivres partiront en cargo, direction Mayotte.

Des conteneurs pour acheminer l’aide à Mayotte 

Depuis samedi, les associations bordelaises et acteurs locaux établissent leur feuille de route. Mahorais d’origine, Chaharmane Ibrahim apporte beaucoup à cette chaîne solidaire naissante en assurant l’acheminement des vivres par conteneurs : « J’ai une maison à Mayotte qui a été dévastée. Je connais bien l’île, j’ai vécu là-bas. Je ne pouvais qu’apporter mon aide à ma propre échelle. » Depuis l’annonce de la catastrophe, il met gratuitement à disposition un espace dans les conteneurs de son entreprise d’import-export pour coordonner les dons spontanés au départ de Bordeaux. « Je reçois des dons à la fois d’associations, mais aussi de particuliers, rapporte-t-il. Par exemple, une entreprise dans le domaine du soin a proposé d’envoyer du matériel médical. » Plusieurs fois par semaine, deux ou trois conteneurs partiront donc en direction de l’île, chargés en majorité de dons alimentaires.

Au moment de la crise de l’eau à Mayotte en 2023, le même dispositif avait déjà fait ses preuves en permettant d’acheminer de l’eau potable. À Bordeaux, la situation à Mayotte a d’autant plus d’échos que la ville dispose d’une population mahoraise importante, environ 2000 ressortissant·es éparpillé·es dans la métropole. Composé d’initiatives à la fois spontanées et organisées, un élan de solidarité se dessine dans la métropole bordelaise. Cependant, d’autres acteur·ices préfèrent opter pour un rassemblement des forces plutôt que d’agir sur le vif. « Autant être efficaces en étant structurés que d’éparpiller nos ressources. Je pense que c’est la communion des forces qui sera le plus efficace », rapporte Chamssidine Assani, président de l’Union des associations mahoraises en Gironde (UAMG).

« Au moins 6 mois de galère, là-bas »

Une fois l’état de choc passé, la solution validée par l’UAMG repose sur l’envoi de fonds monétaires en partenariat avec la Fondation de France et la Croix-Rouge. Le soutien financier prendra la forme de liens vers une cagnotte en ligne pour les deux organismes : « Ces organismes pourront agir sur le long terme. La Croix-Rouge est implantée localement et connaît bien le territoire mahorais. C’est un gros avantage pour agir rapidement », précise-t-il. À son échelle, le conseil municipal de la mairie de Bordeaux se mobilise également, en proposant une aide exceptionnelle de 10 000 euros « pour répondre aux besoins urgents des habitants via le Secours populaire français », selon un amendement proposé par la majorité. Le montant définitif du budget sera voté le 28 janvier. 

Mais les besoins ne concernent pas que les dons alimentaires remarque Jean-François Trapy, président de l’Union Nationale des Associations Autonomes des Parents d’élèves en Aquitaine (UNAAPE) : « On est partis pour au moins 6 mois de galère là-bas. Toutes les écoles avec lesquelles nous sommes partenaires sur place ont été rasées. Il va falloir du matériel scolaire, mais aussi des jouets pour les enfants. » Après une réunion nationale mardi 17 novembre, l’association UNAAPE France annonce mettre en place une cagnotte sur Hello Asso. Des points de collectes seront également mis en place dans certaines mairies de la métropole bordelaise à partir du 6 janvier.

Elise RAIMBAUX

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