Les trains de nuit reviennent en Gironde

Le 10 septembre 2023, le collectif « Oui au train de nuit » manifestait à la gare de Bordeaux Saint-Jean. © Collectif Oui au train de nuit

Depuis hier soir, les trains de nuit sont de retour en Gironde. Leur développement futur n’est pourtant pas gagné d’avance dans le département.

Fermer les yeux à Paris, au rythme du ronronnement des rails, et les rouvrir dans le Sud-Ouest, c’est de nouveau possible. Ce mardi 17 décembre, après sept ans d’absence, le train de nuit a fait son retour en Gironde. En 2017, la célèbre Palombe Bleue reliant Paris à Tarbes était supprimée sur décision de l’État. Relancée quatre ans plus tard, cette ligne nocturne compte désormais deux nouveaux arrêts, dont un dans le département. Du lundi au vendredi, l’Intercités de nuit desservira Facture-Biganos, au sud-ouest de Bordeaux. Un trajet effectué en 8 heures dans le sens Paris-Biganos, en 9 heures dans la direction inverse, et des billets en vente à partir de 37 euros.

Selon SNCF Voyageurs, le choix de cette gare « permettra des correspondances TER optimisées avec le bassin d’Arcachon ». Autre argument invoqué : la gare de Bordeaux Saint-Jean étant fermée la nuit, « un arrêt commercial y est impossible ». Pas d’inquiétude pour les voyageur·ses nocturnes souhaitant rejoindre la métropole : le RER métropolitain assure des correspondances régulières entre Bordeaux et Biganos. L’arrivée à Facture-Biganos à 5 h 48 permettra de monter à bord d’un TER à 5 h 57 pour Bordeaux Saint-Jean. 

Un retour isolé ?

Sur fond de nostalgie, ce come-back répond à des exigences économiques et environnementales. Dans les années 1970, le train de nuit connaît ses heures de gloire en France. Relié à Lisbonne, Quimper ou encore Lyon, Bordeaux est au cœur de ce réseau ferroviaire nocturne. Mais dès 1981, la bascule s’opère. Arrivée du TGV, concurrence de l’avion et de l’automobile, baisse de l’investissement public sur le réseau secondaire… Le déclin des wagons-couchettes est enclenché et de nombreuses lignes en partance de la chef-lieu girondin sont supprimées. En 2017, l’inauguration de la LGV Paris-Bordeaux signe la fin des voitures-lits sur le territoire.

Aujourd’hui, avec son plan de relance du train de nuit en France pour 2030, l’Etat semble faire marche arrière. En 2021, un rapport du gouvernement sur les Trains d’équilibre du territoire préconisait la création de 25 lignes nocturnes, dont Bordeaux-Nice et Bordeaux-Genève. Pourtant, à  l’heure actuelle, seuls des trains de nuit Paris-Région ont vu le jour. « Une vision centrée sur la capitale, et un gouvernement frileux sur les lignes transversales (entre régions, sans passer par Paris, NDLR) » dénoncés par Pascal Dauboin, porte-parole du collectif Oui au train de nuit.

Le rapport du gouvernement sur les Trains d’équilibre du territoire prescrit la création d’une vingtaine de lignes de trains de nuit à l’horizon 2030 (2021).

Collectifs et élu.es à l’assaut

La mobilisation s’organise pour une réintégration de Bordeaux dans le système des trains de nuit. Dans le réseau pensé par le collectif Oui au train de nuit pour 2030, c’est tout un chapelet de lignes nocturnes qui graviterait autour de la métropole.

Carte imaginée par le collectif Oui au train de nuit pour les trains de nuit en Nouvelle -Aquitaine d’ici 2030. © Collectif Oui au train de nuit

Autre levier d’influence : les revendications des élu·es locaux·les. « Défendre les trains de nuit, c’est aussi défendre le train du quotidien », avance Christine Seguinau, conseillère régionale écologiste de Gironde et membre de la Commission Transport. Elle poursuit : « Investir pour la rénovation des lignes nocturnes permettrait une meilleure circulation des trains le jour, donc une accessibilité optimisée du territoire ». En juin 2024, son groupe politique a proposé un vœu pour la réouverture de la ligne Bordeaux-Lyon et son inscription dans les lignes de nuit plan 2030. Une motion adoptée par le Conseil régional. Selon Olivier Cazaux, militant écologiste et élu bordelais, « le retour des trains de nuit est un combat pour l’écologie ». En effet, selon l’étude menée en 2021, le report de l’avion et de la route sur le train réduirait de 95 % les émissions de CO2 liées à ces déplacements. Et tandis que la façade atlantique est la grande oubliée des futures liaisons nocturnes, sans doute faudra-t-il encore militer en pyjama, comme l’avait fait Oui au train de nuit en septembre 2023. 

Lucie QUELLARD

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