Deuil de l’enfant : une journée mondiale avec peu d’échos en France

Depuis 1997, l’association The Compassionate Friends organise une journée annuelle à la mémoire des enfants partis trop tôt © The Compassionate Friends

Chaque année, la journée mondiale des enfants partis trop tôt se déroule au début du mois de décembre. Un jour consacré aux familles du monde entier ayant perdu un enfant. Une commémoration importante aux États-Unis et en Allemagne, mais encore méconnue du grand public en France.

Une bougie pour se souvenir.  Que ce soit sur un rebord de fenêtre ou bien au travers des réseaux sociaux, ce sont des milliers de familles américaines qui célèbrent à l’occasion du Worldwide Candle Lighting Day la mémoire de leurs enfants partis trop tôt. Un moment de recueillement organisé par l’association The Compassionate Friends depuis 1997, et reconnue comme jour national par l’État américain depuis 2004, après la déclaration du président américain William J. Clinton en 1998. En Europe, l’idée d’une journée de commémoration fait son chemin dès 2001 en Allemagne, où le groupe de soutien « Leben ohne Dich » (la vie sans toi) apparaît sur Internet. Pour la France, tout est plus tardif. En 2007, l’Association des familles en deuil d’un enfant (AFDE) en Haute-Saône est le premier groupe d’entraide et d’écoute créé pour les parents endeuillés en France. Depuis, plusieurs associations similaires naissent en France, mais la journée reste discrètement implantée et bénéficie d’une timide médiatisation. 

Un dialogue difficile entre les familles endeuillées et leurs proches

« Il y a un différentiel important entre les attentes de la personne endeuillée et celles de ceux qui ne le sont pas. » explique Patrick Thierry, qui a fondé avec sa femme Marianne l’AFDE. « Ces derniers vont avoir en tête de ne surtout pas parler de l’enfant décédé, alors que la personne endeuillée n’attend qu’une chose, c’est qu’on en parle, justement. » En France, le dialogue entre ceux qui ont, et ceux qui n’ont pas connu le deuil d’un enfant, est difficile. « On ne peut pas dire l’indicible et l’incommunicable à des oreilles qui ne souhaitent pas l’entendre. », explique Patrick Thierry. Pour renouer ce dialogue sur ce deuil, une possibilité évoquée serait de reconnaître la journée des enfants partis trop tôt à un niveau national, comme aux Etats-Unis, où les associations liées au jour de mémoire sont exemptées de toutes les taxes fédérales. Par la proclamation d’un jour dédié, les Etats-Unis ont aussi permis aux associations d’acquérir une légitimité auprès des familles, qui ont pû trouver des réponses auprès d’elles, et de sensibiliser le grand public. En France, le manque de reconnaissance est lourd : « la société dit : “c’est pas mon problème, c’est le vôtre” », décrit Patrick. Mais lorsque les familles ne sont pas soutenues, elles s’autorisent difficilement à poursuivre leur vie. « Lorsque nous, parents endeuillés, allons au cinéma par exemple, nous nous demandons si nous avons le droit. Notre enfant disparu, nous l’a-t-il autorisé ? » Dans les premières années de l’AFDE, Patrick avait discuté avec une représentante des familles endeuillées allemandes pour la création d’une association unique européenne, à l’image de The Compassionate Friends aux États-Unis. Depuis, l’idée n’a jamais vu le jour. 

Nathan Clergue

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