Patient hospitalisé au CHU, annulation du Nouvel an Chinois et rapatriement d’étudiants bordelais. Le coronavirus affecte la ville girondine qui possède des liens forts avec la Chine.
Il a 48 ans, il travaille dans la vigne à Bordeaux, et aujourd’hui, il est le patient le plus célèbre du CHU de Bordeaux. On connaît peu de choses sur lui, si ce n’est sa ville d’origine : Wuhan, ville foyer du coronavirus et jumelée avec Bordeaux depuis 1998.
Entre la Belle endormie et l’empire du Milieu, des relations fortes et pourtant méconnues. Tous les ans, le dragon coloré dodeline dans les rues pavées du centre-ville bordelais à l’occasion du Nouvel An chinois. Mais pas cette année. Par mesure de « précaution », les festivités qui devaient avoir lieu dimanche dernier ont été annulées par les organisateurs. Ne subsiste que des lampions écarlates le long de la Rue Sainte-Catherine.
La communauté chinoise à Bordeaux est importante et bien implantée. Plusieurs générations se sont succédé, auxquelles s’ajoutent tous les ans de nombreux étudiants. D’après le rapport de la Communauté d’universités et établissements d’Aquitaine (ComUE) en 2017, les étudiants chinois sont parmi les plus représentés, hors ressortissants européens. “On accompagne 600 étudiants”, confie Stéphane Domecq chargé de la communication de l’association Club Passerelle France-Chine de Bordeaux. Son président Yang Xu l’a créée dans l’optique de “mettre en lien des étudiants chinois qui n’avaient pas d’interlocuteurs sur place”.
Sur le territoire bordelais, d’autres associations oeuvrent activement pour la promotion de la culture chinoise. L’association Mei Hua créée en 2015 organisera en février, en partenariat avec la mairie de Bordeaux, des ateliers de découverte de la langue et de la calligraphie à destination des séniors. En dehors de ces activités, la structure organise également des projections de films. « On constate que le public est de plus en plus constitué d’étudiants ou de jeunes adultes aspirant à travailler en Chine », affirme Meilian Chan, fondatrice de l’association.
Face à cette demande croissante d’ouverture vers la Chine, le réseau universitaire bordelais développe des partenariats avec le pays et en particulier avec sa ville jumelle Wuhan. En 2016, le CHU de Bordeaux et l’hôpital Asia Heart de Wuhan ont créé un centre de formation en cardiologie et depuis des étudiants de la ville viennent se former à Bordeaux. Inversement, la capitale girondine envoie chaque année des étudiants en Chine. Des échanges perturbés cette année par le déclenchement de l’épidémie de Coronavirus : l’école de commerce Kedge a décidé de rapatrier en urgence ces étudiants.
L’attrait de la vigne
Derrière ces échanges culturels et de savoir, reposent des enjeux économiques. Et à Bordeaux, la bouteille de vin n’est jamais bien loin. En 2016, d’après les chiffres de la Chambre d’Agriculture de Gironde, 80% des ventes de vins sur le marché chinois étaient des vins bordelais. Les consommateurs sont au rendez-vous, mais aussi les investisseurs. Parmi les 167 vignoble passés sous pavillon chinois, Laurence Lemaire, sur son blog « L’Hebdo, le vin, la Chine », en dénombre 155 pour les vins de Bordeaux.
Les vignes bordelaises attirent. Depuis dix ans, Wuhan accueille le festival des Vins de Bordeaux et de Nouvelle-Aquitaine organisé par les différents acteurs du secteur agroalimentaire. La filière viti-vinicole ne compte pas s’arrêter là. En 2018, La Fondation pour la culture et les civilisations du vin, gestionnaire de la Cité du Vin, a annoncé la création d’un musée du vin à Pékin avec des partenaires chinois. Elle verra peut-être le jour en 2021, année du Buffle.
Timothée Croisan-Cécina, Jordan Dutrueux