+74% en 2018, -59% en 2016, +101% en 2014. Chaque année, les chiffres des actes antisémites en France interpellent. Le ministère de l’Intérieur a rendu public, ce mardi, ceux de l’année 2018. Décryptage.
- Un chiffre facile à commenter, difficile à interpréter
Qu’est-ce qu’un « acte antisémite » exactement ? Le recensement par le ministère de l’Intérieur, des actes antisémites repose sur deux grands catégories : d’abord, les actions, c’est-à-dire les violences, les tentatives d’homicides ; puis les menaces, soit les propos, gestes menaçants et démonstrations injurieuses, tracts, courriers et inscriptions.
En 2018, parmi les 541 faits, 183 actions antisémites ont été recensées dont 81 concernant des violences, des tentatives d’homicide et un homicide et 102 concernant des atteintes aux biens. Par ailleurs, 358 menaces à caractère antisémite ont été dénombrées.
D’où viennent ces chiffres ? Ils ont été établis en croisant les dépôts de plaintes comptabilisés par les services de renseignement territorial, les procédures de police et de gendarmerie. Cependant, nombre de cas de cyber-menaces ne débouchent pas sur un dépôt de plainte. Cette tendance inquiète Clothilde Chapuis, présidente de la LICRA en Gironde, qui pointe du doigt cette zone d’ombre.
- Distinguer actions et menaces
Autre point complexe lorsqu’on aborde ces 74% : les proportions que représentent le nombre d’actions et celles des menaces dans le calcul global des actes antisémites. Alors que le nombre de violences effectives est plus ou moins stable depuis 10 ans, celui des menaces est beaucoup plus fluctuant. La variation du nombre de menaces influe donc particulièrement sur le résultat global des actes antisémites recensés.
Pourquoi de telles fluctuations ? Il est également intéressant d’observer la correspondance de certains pics de dépôts de plainte avec la médiatisation de certaines actions particulièrement chocs contre la communauté juive, notamment les attentats de 2012 à Toulouse et celui de l’Hypercacher en 2015.
Le grand rabbin de Bordeaux invite d’ailleurs à la prudence quant à l’interprétation de ces chiffres. Il en conclue tout de même que cette hausse de 74% témoigne d’une situation alarmante, confiant également que les familles juives préfèrent placer leurs enfants dans des établissements privés pour « plus de sécurité« .