L’art au placard

En difficulté depuis plusieurs années, le secteur culturel n’est pas épargné par la crise du Coronavirus qui le frappe de plein fouet. Pour les artistes auto-entrepreneurs, souvent précaires, le quotidien s’assombrit un peu plus en cette période de report généralisé des commandes.

Pour Manon Guenot, photographe à son compte depuis près d’un an, cette période tombe au pire des moments : « la première année est décisive quand on crée une entreprise ». Elle sait pourtant que son sort est plus enviable que d’autres. « j’ai réussi à me faire pas mal de contacts et j’ai pu réaliser quelques shootings, juste avant le confinement, ce qui me sauve financièrement pour l’instant ».

Première année, double peines 

Non sans lien avec sa région d’adoption la Haute-Savoie, Manon s’est spécialisée dans la photographie de montagne. Elle travaille pour différents clients du secteur, des stations de ski aux marques d’équipements de haute montagne, comme Salomon. « Mais cette année, la neige n’a pas vraiment été au rendez-vous » souligne-t-elle, ainsi certains de ses contrats se sont vus reporter, peut-être à l’année prochaine. Ceux d’ores et déjà signés restent le seul gage de revenus, « dans ce cas, le contrat m’apporte une certaine garantie de travail. Pour le moment aucun n’a été rompu, mais leur report risques d’être dans longtemps ». A la reprise de leurs activités, les entreprises ne feront pas de la photographie leur priorité. Ces dernières souhaitent « sortir la tête de l’eau » avant d’accorder ce type de dépenses souvent perçues comme superflues. C’est précisément ce temps de latence, ajouté à celui du confinement, qui inquiète la jeune auto-entrepreneure. 

Un avenir flou

Un autre aspect de la vie de ces travailleurs indépendants se voit lui aussi paralysé en temps d’isolement forcé : le réseau. Comme Manon l’explique, «  en tant qu’indépendante le fait de ne pas avoir de continuité dans mon travail est problématique. C’est un petit monde qui marche surtout avec le bouche à oreille. Quand on commence tout juste, n’avoir aucun contact pendant un ou deux mois est très pénalisant pour se faire connaitre ».  Généralement, les artistes dans son cas ne possèdent pas de locaux pour se développer, ce qui rend donc leurs liens avec la clientèle plus fragile.

Pour le moment, « on est dans le flou. À défaut de pouvoir prendre des photos, je prends mon temps pour les retouches. Une fois finies, ce sera vraiment le calme plat ». Depuis le début du confinement le gouvernement français a mis en place un dispositif d’aide exceptionnel destiné aux auto-entrepreneurs. « Mais le dispositif est prévu pour les entreprises ayant plus d’un an. Ce ne sera mon cas que dans quelques semaines, j’espère donc pouvoir en bénéficier tout de même ».

Les trap houses au rythme du COVID-19

Soudière aux platines aux côtés de DJ Young vamp

Soudière est lui aussi autoentrepreneur depuis 3 ans. Les mesures de confinement réduisent elles aussi une partie de l’activité de ce compositeur de « trap » basé à Strasbourg. « C’est surtout gênant pour mes prestations qui sont annulées, donc c’est toute cette partie de mon salaire en moins. Surtout qu’en cette période de l’année, les concerts reprennent. Avec la fermeture des lieux culturels, je ne peux pas aller vendre mon produit aux salles pour programmer des prestations futures. » Comparaison faite avec d’autres artistes, totalement dépendants des revenus de leurs concerts, il reconnait que le confinement ne contraint que partiellement. « Personnellement, je me produis peu sur scène. La dernière fois c’était en octobre, donc ça m’impact peu. Sinon je travaille toujours depuis chez moi, où j’ai installé mon studio, ça me permet de composer dans des conditions similaires à la normale. »

 La musique électronique présente certains avantages en période de confinement, le fait de pouvoir composer seul de chez soi reste le plus flagrant. Avec les membres de son crew Purplepossy originaires des quatre coins du monde, Soudière n’a pas attendu le virus pour communiquer virtuellement. «  On a l’habitude de faire des skype pour communiquer et s’envoyer nos sons. Donc clairement, là-dessus ça ne change vraiment rien ». Pour Soudière le confinement peu même présenter quelques opportunités « Comme les gens sont enfermés chez eux, ils passent plus de temps que d’habitude à écouter de la musique sur internet ». Un nombre d’écoute en hausse donc, synonyme de revenus supplémentaires pour le jeune artiste diffusé sur des plateformes de streaming comme Spotify ou Soundcloud

le titre comptabilise déjà plus de 50 000 vues depuis sa mise ne ligne le 17 mars

Le virus se révèle également source d’inspiration pour le jeune producteur. Dans le titre Corona doomsday en collaboration avec DJ Smokey et paru au début de la pandémie, il aborde de manière singulière un virus qui n’a pas fini de faire parler … ou danser. 

Crédit photo Lyne Alaoui

Noa Thomas

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