Patrimoine et accessibilité, une conciliation difficile?

Bordeaux accueille les 25 et 26 mars prochains la neuvième édition des Abilympics, championnats du monde des métiers des personnes handicapées. L’occasion pour Imprimatur de se pencher sur la question de leur intégration dans l’espace public.

Arpenter les rues, visiter les musées et explorer les monuments historiques… voilà le programme type d’un touriste venu découvrir les splendeurs de Bordeaux ! Mais un handicapé peut-il prétendre au même parcours ? A t’il accès aux bâtiments classés de la ville ? Imprimatur a tenté d’en savoir un peu plus.

En France, c’est obligatoire, les bâtiments publics doivent être accessibles à tous, handicapés  compris. Si la mesure est respectée dans les constructions récentes, les choses sont un peu plus compliquées lorsque l’on parle de bâtiments classés. A Bordeaux, cette question est d’autant plus importante qu’entre la Tour Pey-Berland, la basilique Saint-Michel et le pont de Pierre, la ville regorge de bâtiments historiques.

Des aménagements réussis. 

Le grand théâtre de Bordeaux.

Dans le centre-ville, les exemples de bâtiments rendus accessibles aux personnes handicapées sont nombreux. Philippe Lefebvre est chargé de mission à l’accessibilité de l’association des paralysés de France à Bordeaux. Il participe régulièrement à des commissions chargées de trancher ; ce bâtiment devra être rendu accessible, celui-ci ne le sera pas. Il commence par citer l’exemple du Grand Théâtre.

« Il a fallu plusieurs années de débats, personne n’était d’accord mais à force de discussion, on a réussi à trouver une solution ».

Un ascenseur sera donc construit à l’intérieur de l’opéra afin de permettre aux personnes en fauteuil roulant d’accéder à tous les étages du bâtiment. Du hall au paradis, elles ont désormais accès à l’intégralité de l’un des plus beaux édifices bordelais.

Un dispositif similaire a été mis en place au sein de la mairie de Bordeaux qui a installé un ascenseur à la demande de la commission d’accessibilité.

Construite au XIème siècle, la basilique Saint-Seurin, est certainement l’un des plus beaux monuments classés de la ville. Le bâtiment est d’ailleurs inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1998. Situé Place des martyrs, une rampe y a été aménagée à l’arrière du bâtiment. Les personnes en fauteuils ont désormais accès à la nef principale, de style gothique dont les vitraux valent le détour.

Comme le résume une des architectes du cabinet Architecture Patrimoine, « ce qui est difficile dans notre métier, c’est de réussir à faire la part des choses entre l’esthétique originelle du bâtiment et son adaptation aux normes. Préserver le bâtiment mais permettre à tout le monde de le visiter ! ».

Et comme un musée peut également être un site classé, on notera que celui des Beaux-Arts de la ville a également été adapté, avec la mise en place d’une rampe extérieure.

Et quand ça bloque…

Il arrive aussi que les choses se compliquent. Lorsqu’un architecte pense qu’aménager un bâtiment ancien risque de l’abîmer, ou que cela coûte tout simplement trop cher, il peut le faire savoir et tenter de faire une dérogation. Dans ces cas-là, l’édifice classé reste dans son état initial. A Bordeaux, les exemples ne manquent pas.

Marie Ghidinesco est membre du CHRM d’Aquitaine, la mission consacrée à la conservation régionale des monuments historiques. Elle est bien consciente des difficultés auxquelles elle est régulièrement confrontée.

« C’est toujours compliqué. D’un côté il faut évidemment permettre à un maximum de gens de visiter ces bâtiments, mais de l’autre il faut rénover en utilisant au maximum des matériaux nobles. »

Tour_Pey-Berland_01Outre la basilique Saint-Michel, sa crypte et son imposante flèche qui culmine à 114 mètres de haut, la Tour Pey-Berland constitue un parfait exemple de tentative avortée ; la tour construite au XVème siècle est trop ancienne et trop étroite pour y envisager le moindre travail. Mais pour ne pas priver les personnes handicapées d’une des plus belles vues de la ville, une solution alternative a été trouvée : l’installation d’une télé au bas de tour, reliée à une caméra installée à son extrémité. Ainsi tout le monde pourra avoir une idée de la vue qu’on a de tout la haut. Fauteuil ou pas fauteuil.

Salomé Parent

 

 

Retour en haut
Retour haut de page