Le Scroll du jour : A Paris, un projet d’hébergement pour les SDF divise

Dans le très chic 16ème arrondissement parisien, plusieurs bâtiments doivent accueillir, d’ici l’été prochain, plus de 200 sans-abris. Une opposition de riverains qui s’est violemment exprimée a fait immédiatement réagir les médias et ça ne semble pas fini. Si certains ne prennent pas vraiment parti, d’autres continuent de se mouiller en dénonçant le ridicule de la situation.  

« Hidalgo démission« , « Assez d’assistanat« , « Touche pas à mon arbre« . Voici les slogans scandés lundi soir, par les habitants du 16ème arrondissement de Paris, en marge d’une réunion publique concernant le futur centre d’accueil qui doit être construit en bordure du bois de Boulogne. Une polémique qui malgré les jours qui passent ne se tasse pas… L’hebdomadaire Marianne décrit un lieu « assiégé par une foule en colère » et évoque des « riverains absolument déchainés« . Pour nous faire « palper » l’ambiance, le magazine rapporte également les propos d’un manifestant : « notre très cher Président n’a qu’à les accueillir à l’Elysée ! » Dans son article, l’hebdomadaire de gauche donne une image peu reluisante de ces opposants au projet.

Solidarité vs sécurité : qu’en pensent les médias ? 

Et il n’est pas le seul ! Ce matin encore, le Grand soir 3 de Francetv info dénonce sur son site un manque de solidarité évident : « On souligne ainsi la solidarité à deux vitesses avec cette phrase entendue pendant la crise des migrants : ‘On ferait mieux de s’occuper de nos SDF français plutôt que des réfugiés. Mais pas dans le XVIe par contre’. »

Médiapart également, prend parti sur son site en titrant « Paris XVIe ou la haine des classes… » Le site publie la vidéo du 13h de France Info, sur ce sujet « tout sauf négligeable ». L’invité de l’émission, Monique Pinçon-Charlot, une sociologue connue pour son engagement sur les inégalités sociales, n’y va pas de main morte. Pour elle, la violence des « réactions », pour ne pas dire des « riches », dépasse l’entendement…

Mais cette opposition est soutenue par le maire (Les Républicains) du 16e arrondissement, Claude Goasguen, rappelle le Figaro. Monsieur Goasguen dénonce pour sa part un « diktat » de la maire de Paris, qui ne l’aurait pas averti avant d’initier le projet. Selon lui : « Les gens du 16e sont réputés pour rester le cul dans leur fauteuil, à regarder la télé et manger du caviar, mais il défendent leurs intérêts comme les autres« . Le journal n’écrit sur le sujet que des articles factuels, sans prendre parti. Mais il prend le temps de souligner brièvement que le site du bois de Boulogne est classé, mettant ainsi en avant l’argument écologique souvent évoqué par les manifestants. «On est une des villes qui a le moins d’espaces verts et on les grignote», s’insurge le sexagénaire en costume vert dans les pages du Figaro. «C’est facile, les arbres ne se défendent pas» surenchérit-il.

« La peur irrationnelle » des « ghettos de riches » 

Ce matin, la journaliste Léa Salamé sur France Inter, a quant à elle décidé de donner la parole à Emmanuelle Cosse sur ce sujet. L’occasion pour la nouvelle ministre du Logement de dénoncer des « ghettos de riches dans le XVIe parisien ».

Et comme on s’y attendait… Sur les blogs en ligne aussi les réactions continuent, encore aujourd’hui, à mettre de l’huile sur le feu. « On la pensait polie, réservée, chic et maniérée, patatras tout le vernis a explosé quand la bourgeoisie du 16ème arrondissement a appris qu’elle cohabiterait avec des SDF » dénonce un blog très proche du Front de gauche.

L’Humanité, moins critique dans ses mots, mais d’accord sur le fond, évoque une « peur irrationnelle » et dépeint une extrême violence de la part des manifestants.

La polémique gonfle à cause des amalgames tient à précisé le quotidien qui dénonce une énorme confusion sur le public cible de centre… Il s’agit là de sans abri, non de réfugiés !

Le fact checking qui nous remet les pieds sur terre

Et le Lab d’Europe1 croit connaitre la source de ces amalgames en pointant du doigt Florian Philippot dont les propos n’ont fait qu’envenimer la situation.

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 » Rien n’est perdu si ce n’est la vérité. Florian Philippot affirme que le projet de centre d’hébergement par la mairie de Paris est destiné aux réfugiés. Or, lundi 14 mars, la secrétaire générale de la préfecture d’Île-de-France Sophie Brocas a assuré, lors d’une réunion à l’université Paris-Dauphine, que le centre n’accueillera aucun migrant » dénonce le site du Lab politique

L’Humanité souligne d’ailleurs qu’il n’y a pas que des habitants du 16ème qui ont manifesté. Selon le quotidien, nombre de partisans du Front-national se seraient joints à ce joyeux cortège.

« Rien n’est perdu », pas même la solidarité 

Mais malgré les réticences, le Huffington post rappelle tout de même que certains habitants du 16e arrondissement ont fait le déplacement pour soutenir l’accueil des migrants. « ‘C’est à nous, les riches, d’aider les pauvres’, s’offusque une homme d’une cinquantaine d’années », rapporte le pure player.

Le site souligne donc que certains riverains comprennent le besoin de rééquilibrer l’offre de logement vers les quartiers qui en sont dépourvus. Le 16ème arrondissement ne compte que huit places en hébergement d’urgence, sur un total de 9700 dans la capitale. D’où cette incompréhension des médias face à cette mobilisation.

Une incompréhension largement partagée par la twitto-sphère. Avec le hashtag #InsulteCommeUn ThugDuXVIème, la toile s’en est donné à cœur joie ! Près de 8 000 tweets ont raillé les opposants au centre. On y retrouve par exemple « Accueillir un centre de SDF avec nos impôts ?! Et puis quoi encore ?! On a déjà une gare RER » ; « T’es tellement pauvre que ton antichambre, ton séjour, ta salle à manger et ton salon, c’est la même pièce« . Le Huffington post leur consacre d’ailleurs un article entier.

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Camille Humbert

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