Cornélius a 25 ans !

Cette semaine, Imprimatur s’intéresse à l’univers de la bande dessinée à Bordeaux. La Maison d’édition Cornélius, installée dans la capitale girondine depuis deux ans, est un lieu emblématique du 9ème art bordelais. Et cette année, on fête ses 25 ans d’existence ! L’occasion de la faire parler…

Cornélius
Sagamore, le père fondateur de la maison d’édition Cornélius.

 

Depuis 25 ans, les éditions Cornélius c’est avant tout une grande famille. Sagamore Cornélius, personnage totalement fictif, en est le père fondateur. Dans l’esprit de la bande-dessinée, les éditeurs ont ainsi imaginé différents protagonistes pour personnifier la maison. Avec 12 collections distinctes, on y compte autant de membres dans la « famille ». Les enfants imaginaires : Raoul, Delphine, Solange, Jean-Jacques, Blaise, et ainsi de suite, représentent chacun une collection. Tandis que le père – le fameux Sagamore donc – dirige et supervise cette fine équipe.

Leurs amis, leurs amours, leurs emmerdes
Ils sont jeunes, talentueux et se sont fait un nom dans l’univers de la bande dessinée. Et pourtant ! L’équipe de la maison d’édition Cornélius a connu moult péripéties, comme les personnages de BD qui la font vivre.

Tout commence à Paris. Après des tours de casquettes auprès de ses amis pour boucler le capital, Jean Louis Gauthey fonde la maison en 1991. Au départ de l’aventure, seuls des ouvrages entièrement sérigraphés sont édités. Pourquoi ce choix ? La sérigraphie est un procédé d’impression qui demande peu de moyens. On peut commencer dans une chambre de bonne ; c’est qu’ils ont fait,  dans un local de 12 m2.

Les débuts furent marqués par plusieurs échecs, dus en partie à des problèmes de financement. En 1992, Cornélius fait paraître Harlem de Robert Crumb. Premier livre et première catastrophe. L’ouvrage, dont le rendu est « gras » et de mauvaise qualité, est retiré de la vente aussitôt qu’il est sorti. Un an après, c’est Alphabet Capone de Willem qui connait un problème de reliure. Certains tirages sont encore à relier. Le dépôt de bilan est frôlé d’un poil.

Des jours meilleurs
Avec le temps, la maison se relève. En 1998 l’année commence en beauté grâce à Big Man de David Mazzucchelli. Malgré quelques ratés dans l’impression de la couverture, c’est une franche réussite pour les éditeurs qui grimpent. Robert Crumb, l’un de leurs auteurs sera même nommé à la tête du festival d’Angoulême en 1999. Dans les années 2000 la sérigraphie est finalement abandonnée. A l’époque, un choix s’impose : « Editeur ou sérigraphe, il faut choisir » explique Sagamore Cornélius. Puis les succès s’enchaînent. Jusqu’au déménagement à Bordeaux, il y a deux ans. Pourquoi Bordeaux ? Le ras-le-bol de la vie parisienne… La nouvelle aventure bordelaise de la maison d’édition lui permet d’ailleurs un rapprochement avec les éditions des Requins Marteaux.

Une réussite qui s’explique notamment par la charte graphique
Les amateurs peuvent reconnaître les livres édités par Cornélius en un coup d’œil, grâce à sa charte graphique. Pourtant, pour Sagamore, il faut bien « révéler à tous la peu glorieuse vérité : mes enfants n’ont pas la moindre connaissance en la matière. » C’est pourquoi, très vite, le choix est fait d’opter pour des codes simples. Des codes qui, aujourd’hui, sont une marque de fabrique : titres soignés, contraste des couleurs et simplicité.

Solange et Paul plient bagage et mettent le cap sur l’étranger
La ligne éditoriale se compose quant à elle, en trois axes essentiels : un tiers de traduction, un tiers de patrimoine de la bande dessinée, et le dernier tiers de création, pour promouvoir la jeune BD. C’est d’abord du côté de la traduction, que la maison fonde son succès. Notamment avec la collection « Solange ». Solange (mais pas qu’elle) propose de grands noms de la bande-dessinée américaine, comme Charles Burns, ou encore Robert Crumb, que nous avons déjà évoqué. C’est aussi par la découverte d’œuvres japonaises que les éditions Cornélius se démarquent. Notamment avec la collection « Paul ». On y retrouve les ouvrages du mangaka Mizuki, ou encore celles d’Osamu Tezuka. A l’occasion du 25ème anniversaire de la maison, c’est d’ailleurs le manga qui est mis à l’honneur. Six lots promotionnels sont en vente tout au long de l’année.

« Du bon vin, du mauvais esprit et du travail bien fait »
Sagamore nous livre sa conclusion à ces 25 ans d’histoire. « Le parcours qui fut le nôtre n’a pas grand chose à voir avec les mythologies qu’on fabrique sur mesure dans les maisons d’édition conventionnelles. » explique-t-il. « Notre ligne de conduite s’est imposée d’elle-même, avec le temps : du bon vin, du mauvais esprit et du travail bien fait. » Mais il le dit tout net : « Nous n’étions au départ qu’une bande d’incapables. » Ce qui est devenu au fils des ans, « une certaine façon de faire », n’était le plus souvent que « le fruit de notre ignorance et de nos limites, » avoue-t-il sans broncher. Rien que pour cette sincérité, on leur souhaite un bel anniversaire !

Camille Humbert

 

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